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A Bure, l’Etat nucléaire tente d’enfouir ses crimes




Publié le 4 juin 2021


Photo ACDN

Le procès de sept militants antinucléaires qui vient de se tenir à Bar-le-Duc du 1er au 3 juin après une enquête judiciaire et policière de près de quatre années, 25 perquisitions (dont, chose inouïe, la perquisition du cabinet d’un avocat des prévenus), 29 personnes mises sur écoute, l’enregistrement de l’équivalent de seize années de conversations, plus de 20 000 pages de dossier d’instruction, nous aura coûté près d’un million d’Euros d’argent public (source : Reporterre). Et bien davantage si l’on compte les salaires de tous les fonctionnaires, policiers et gendarmes, mobilisés en permanence dans la région de Bure et le département de la Meuse, pour tenter de démanteler le mouvement antinucléaire, persécuter les militants (les poursuivant pour « association de malfaiteurs », leur interdisant de communiquer entre eux, faisant intrusion avec brutalité dans la « Maison de la résistance » de Bure et dans des domiciles particuliers) et protéger la mise en place par l’ANDRA, à 500 mètres sous terre, d’une poubelle nucléaire.

« Depuis 2017, un escadron de gendarmes mobiles est chargé de surveiller le territoire : 75 gendarmes y patrouillent jour et nuit, 24 heures sur 24. Une surveillance dont les coûts — une dizaine de millions d’euros par an — sont pris en charge par l’Andra et qui pèse lourdement sur la vie quotidienne des habitants. La Ligue des droits de l’Homme a d’ailleurs remarqué dans un rapport que « les contrôles d’identité permanents et répétés portent atteinte aux libertés individuelles » et ne peuvent « que déboucher sur des incidents ». » (Reporterre)

Ce procès sans objet s’est complètement dégonflé avant même d’avoir eu lieu, puisque la justice elle-même a dû prononcer l’an dernier un non-lieu sur les deux principales charges retenues contre les prévenus : un début d’incendie en juillet 2017 dans un hôtel-restaurant, et quelques dégradations en mai 2018 autour de l’écothèque de l’ANDRA. Finalement, ils ne sont plus soupçonnés que d’avoir pris part à l’organisation, le 15 août 2017, d’une manifestation non déclarée, qui fit l’objet d’une violente répression policière

Mais ce que l’Etat cherche à enfouir à Bure, ce ne sont pas seulement des déchets hautement radioactifs à vie longue. Ce sont ses propres crimes. Ceux qu’il commet en exposant quotidiennement la population française aux effluents radioactifs de ses 56 réacteurs électro-nucléaires encore en service et de ses dizaines d’autres Installations Nucléaires de Base (INB). Ceux qu’il a commis en ne consacrant pas à la satisfaction des besoins sanitaires et sociaux les plus urgents les dizaines de milliards qu’il a gaspillés en pure perte dans la construction de Super-Phoenix, celle de l’EPR de Flamanville qui n’a toujours pas produit un seul kilowattheure après dix ans de retard et un budget initial de 3 milliards multiplié par 4, celle des missiles du plateau d’Albion, des missiles Pluton et Hadès, tous envoyés au rencart, et plus généralement la construction, l’entretien, la modernisation et le renouvellement de toute la « force de frappe », cette ligne Maginot des temps modernes qui nous a coûté au bas mot entre 300 et 400 milliards d’Euros (son coût réel restant « secret défense »). Et qui de plus a fait directement de nombreux morts à travers le monde, par les retombées radioactives de ses essais nucléaires. Les vétérans des essais (ou leurs familles) et les Polynésiens en savent quelque chose !

A Bar-le-Duc comme à Bure et ailleurs, ce que l’Etat nucléaire cherche avant tout à enterrer, c’est cette terrible vérité : le nucléaire sert accessoirement à faire bouillir de l’eau pour produire de l’électricité (17% de l’énergie finale consommée en France, à peine 2% dans le monde entier) en polluant la planète pour l’éternité. Mais il sert avant tout à perpétuer l’armement atomique, comme nos quelque 300 bombes H capables de faire près d’un milliard de morts. Les antinucléaires le savent depuis toujours, même s’ils n’y pensent pas suffisamment. Emmanuel Macron leur a donné raison le 7 décembre 2021 en déclarant au Creusot : « Pas de nucléaire civil sans nucléaire militaire, pas de nucléaire militaire sans nucléaire civil ». Depuis ses origines, le nucléaire est fondamentalement mortifère.

Il tue également nos libertés, et ce qu’il nous reste de démocratie.

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