[www.acdn.net] > L’Iran réaffirme qu’il n’a pas l’intention de se procurer l’arme nucléaire
[ http://www.acdn.net/spip/spip.php?article152 ]

www.acdn.net > Accueil > Actualités > Articles d’actualité >

Sur "France-Inter"
L’Iran réaffirme qu’il n’a pas l’intention de se procurer l’arme nucléaire

En direct de Téhéran, une interview d’Ali Lakhidjani, secrétaire général de la Commission de la sécurité nationale


Publié le 16 février 2006

Ce jeudi 16 février, de 7h à 9h (heure de Paris ; 9h 30-11h 30, heure de Téhéran), la station de radio France-Inter a émis son journal du matin en direct depuis Téhéran. Lors de cette émission d’un caractère exceptionnel, Ali Lakhidjani, secrétaire général du Conseil suprême de la sécurité nationale de la République islamique d’Iran, en charge du dossier nucléaire, et conseiller personnel de l’ayatollah Ali Khatami, "guide suprême" de la République islamique, a accepté de répondre en direct aux questions des journalistes de France-Inter, Stéphane Paoli et Bernard Guetta, qui ne lui avaient pas été communiquées à l’avance.

Il a réaffirmé que l’Iran, signataire du TNP à la différence d’Etats comme l’Inde, le Pakistan ou Israël, entend continuer à se soumettre à ses règles tout en usant du droit que le TNP reconnaît à tous les pays signataires de développer la maîtrise de l’ensemble du cycle nucléaire à des fins civiles.

Il a rappelé par la suite que l’Iran, qui avait participé du temps du shah pour 10% au capital d’Eurodif, n’en a reçu ni un gramme d’uranium, ni un dollar. De même, le réacteur atomique (de recherche) construit à Téhéran par les Américains, et dans lequel l’Iran a investi 2 millions de dollars, n’a pas reçu de ces derniers le combustible promis. Il est compréhensible dans ces conditions que l’Iran veuille se procurer lui-même le combustible qu’on lui refuse par ailleurs. Il serait prêt à acheter ce combustible sur le marché international, s’il existait des garanties certaines de fourniture. Pour le moment, ce n’est pas le cas.

L’Iran unanime considère comme conforme à sa souveraineté d’exercer ce droit d’accès à la technologie nucléaire civile. L’Iran ne veut pas de la bombe atomique, tout simplement parce que la bombe n’est plus de nos jours un instrument de puissance régionale, et que celle-ci ne permet pas de résoudre les problèmes politiques. L’Iran est disposé à se soumettre aux contrôles de l’AIEA.

Loin d’écarter la possibilité de poursuivre des négociations avec les puissances occidentales, M. Lakhidjani a au contraire souhaité les reprendre avec l’Union Européenne. Ce n’est pas par une confrontation militaire que l’on peut résoudre ce problème. Il a rappelé par ailleurs qu’Israël dispose, comme chacun sait, de 200 têtes nucléaires, laissant entendre qu’Israël n’est pas particulièrement bien placé pour exiger des autres Etats qu’ils y renoncent.

Il a déclaré que l’Iran, Etat responsable, ne souhaitait pas non plus utiliser l’arme du pétrole qui déstabiliserait l’économie mondiale, mais que cette position pourrait changer en cas de confrontation.

Stéphane Paoli ayant mentionné les toutes récentes déclarations (sur France 2) du ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, affirmant pour la première fois que, selon lui, l’Iran voulait se procurer l’arme nucléaire, M. Lakhidjani a répondu :

"J’ai une grande estime pour M. Douste Blazy mais je ne comprends pas pourquoi il fait de telles déclarations... Je pense que les Français ont une place importante dans cette affaire. Si j’étais à sa place, j’utiliserais cette possibilité... Je pense que la France a la capacité de venir faire la paix, mais pas avec de telles déclarations... L’UE doit avoir sa propre position. Nous sommes prêts à (reprendre) le dialogue avec l’UE. Nous avons engagé le dialogue pendant 3 ans avec l’UE, nous avons suspendu pendant 3 ans notre programme d’enrichissement de l’uranium. L’Iran veut la technologie nucléaire civile dans le cadre de l’AIEA et du TNP."

Il a affirmé que les pays de l’Union Européenne avaient leur place dans une coopératon sur des programmes nucléaires, comme la construction de la cenrale de Bushehr, et que leur présence au sein d’un consortium serait une garantie supplémentaire contre tout détournement de combustible à des fins militaires.

A la question de savoir comment on peut, aujourd’hui, remettre en cause l’existence d’Israël ou celle de la Shoah, comme l’a fait le président Ahmadinejad, M. Lakhidjani a pris ses distances avec les déclarations de "personnalités"... qui sont "une autre question" que celle de la politique de l’Iran. L’Iran demande simplement qu’Israël respecte la démocratie et reconnaisse à ses citoyens palestiniens, qu’ils soient chrétiens ou musulmans, le droit de participer aux élections en Israël.

D’autres questions ont été abordées lors de cette émission. Un homme d’affaires iranien à la tête d’une importante entreprise d’eaux minérales a souligné qu’il souhaitait développer les participations de groupes occidentaux, qui doivent pouvoir s’étendre à divers secteurs économiques de l’Iran. Il a également affirmé que les Iraniens dans leur ensemble approuvaient l’accès à la technologie nucléaire civile comme une question de souveraineté nationale. Des "micro-trottoir" effectués à Téhéran par les journalistes de France-Inter auprès de jeunes (60 % de la population a moins de 25 ans) pourtant critiques à l’égard du régime semblaient aller dans le même sens.

Compte-rendu : ACDN