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Paris, cible nucléaire
Question au maire de Paris, Bertrand Delanoë : que doit faire la France ?




Publié le 7 octobre 2008

M. Bertrand Delanoë

Hôtel de Ville de Paris

Lettre ouverte

Monsieur le Maire,

La semaine internationale pour la préservation de la paix dans l’espace, qui a lieu du 4 au 12 octobre 2008 à l’initiative du Global Network against Weapons and Nuclear Power in Space, nous incite à vous poser une question que vos fonctions actuelles, comme celles que vous pourriez être appelé à exercer un jour, rendent d’intérêt public.

Comme vous le savez, le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, après s’être retiré unilatéralement du « traité ABM », a décidé d’implanter en Europe les éléments d’un « bouclier anti-missiles » : un « radar avancé » en Tchéquie, et une base de missiles dits d’interception en Pologne. La Russie a vainement protesté contre cette initiative qui modifie le rapport des forces nucléaires entre elle et les Etats-Unis. S’estimant menacée, à terme, par une possible « première frappe » américaine, elle a pris ou annoncé une série de mesures destinées à contrer cette menace. Le « re-ciblage » des villes d’Europe occidentale à titre « dissuasif » et par représailles en fait partie. Ainsi la France, alliée aux Etats-Unis et toujours plus engagée dans l’OTAN depuis l’élection du président Sarkozy, voit ou va voir sa capitale redevenir la cible nucléaire qu’elle était au temps de la guerre froide.

Préoccupés de leur vie quotidienne, vos administrés ne pensent peut-être pas ou évitent de penser à cette menace d’anéantissement collectif directement liée au système dit de « dissuasion nucléaire ». En tant que premier responsable de leur sécurité, vous devez certainement, Monsieur le maire, vous en inquiéter, d’autant plus que la ville de Paris a adhéré en 2002, sous votre administration, aux « Maires pour la Paix » (« Mayors for Peace »). Ceux-ci regroupent aujourd’hui sous la présidence de M. Akiba, maire d’Hiroshima, plus de 2400 villes dans le monde entier -dont une centaine en France. La campagne des Maires pour la Paix intitulée « Nos villes ne sont pas des cibles » (« Cities are not Targets ») s’inscrit dans leur « Vision 2020 » qui veut faire de la décennie 2010-2020 « la décennie décisive de l’ONU pour le désarmement nucléaire » (conformément à l’article VI du Traité de Non Prolifération, cosigné par la France).

Les armes en général représentent un gaspillage énorme, un facteur d’inflation monétaire, de déficits budgétaires, de crise économique, d’appauvrissement du plus grand nombre, d’insécurité, de guerre, de destructions, de meurtres et de misère. Ce n’est pas un hasard si le pays dont les dépenses militaires dépassent le total de celles des autres pays s’avère un colosse aux pieds d’argile. Mais quand chaque jour pourrait devenir le dernier, après le départ accidentel ou délibéré de l’une des 27 000 têtes nucléaires disponibles dans le monde, il est essentiel que des voix fortes s’élèvent pour exiger l’élimination de toutes les armes de destruction massive - nucléaires, biologiques, chimiques ou émergentes - au nom des conventions, chartes et traités existants, certes, mais aussi et surtout pour la survie de l’humanité.

C’est le cas aux Etats-Unis, où MM. George Shultz, William Perry, Henri Kissinger, Sam Nunn ont réclamé dans le Wall Street Journal, en janvier 2007 et derechef en janvier 2008, que les Etats-Unis prennent la tête d’un mouvement d’abolition des armes nucléaires. C’est le cas de la Grande-Bretagne, que M. Gordon Brown déclarait en janvier 2008 prête à agir « pour parvenir à un monde libéré des armes nucléaires ». Alex Salmond l’avait déjà réclamé, comme Premier ministre de l’Ecosse - où sont entreposées toutes les armes nucléaires britanniques. Mais on attend encore qu’un responsable digne de ce nom en fasse autant pour la France. Serez-vous celui-là ?

La France doit-elle, selon vous, s’opposer à la « guerre des étoiles », au ciblage des villes par des missiles en alerte permanente, et s’engager enfin pour l’abolition des armes nucléaires ?

- Saintes, ville membre des "Maires pour la Paix" et du réseau "Abolition 2000"
- le 7 octobre 2008

Jean-Marie Matagne,
Président de l’Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire (ACDN)



Lettre demeurée sans réponse.