C’est sous ce titre, mais en version affirmative : "Iran, la guerre inéluctable", que Guy Senbel publiait, le vendredi 11 décembre, son éditorial hebdomadaire sur le site de Guysen International News www.guysen.com), dont il est le fondateur et le rédacteur en chef.
Depuis plusieurs années -au moins depuis 2005-, on a souvent parlé de guerre contre l’Iran, parfois comme imminente, sans que pour autant elle se soit produite. De sorte qu’à force d’entendre crier au loup, on cesse d’y croire. Pourtant, l’analyse de la situation faite par Guy Senbel mérite d’autant plus d’être prise au sérieux qu’il est, parmi les soutiens d’Israël, un éditorialiste modéré et -cela va sans dire- fort bien informé. Nous aurions souhaité reproduire son éditorial in extenso, mais la demande répétée que nous en avons faite étant restée sans réponse, nous nous bornerons à en donner des extraits substantiels.
Selon Guy Senbel, par "son refus obstiné d’abandonner son programme nucléaire et de se plier au droit international", l’Iran alimente "des peurs légitimes, confirmées par des experts occidentaux qui répètent que plus rien n’empêche l’Iran de se doter d’une bombe atomique. Malgré les condamnations prononcées, des sanctions en cours, Téhéran continue de mépriser l’ouverture américaine, le dialogue, la paix. L’Iran est allé trop loin. Les provocations succèdent aux mensonges, et le danger pour la sécurité mondiale est immense. Après des années d’efforts diplomatiques, la guerre semble inéluctable."
(...) "Trop de questions de l’AIEA sont restées sans réponse. Trop d’opportunités politiques ont été manquées pour croire encore à la sincérité de l’argument du nucléaire « civil » prôné par le gouvernement iranien.
Guy Senbel rappelle que "Téhéran a caché un nouveau site d’enrichissement d’uranium à Qom. Téhéran s’est lancé dans le développement de missiles balistiques. Téhéran a choisi d’enrichir l’uranium en Iran alors qu’une proposition avait été faite et acceptée de l’enrichir en France et en Russie. Enfin, Téhéran annonce un programme de construction de dix nouveaux sites d’enrichissement de l’uranium. Et selon le Telegraph britannique, l’Iran cherche à se procurer du combustible nucléaire par l’intermédiaire de sociétés taïwanaises.
"Toutes les conditions sont réunies pour que la crise iranienne trouve une issue dans la guerre."
(...)
"Israël n’est plus seulement une cible idéologique ou l’occasion de manifester une nouvelle solidarité avec tous ceux qui sont encouragés à "résister à l’entité sioniste". "Effacer Israël de la carte" répond à une stratégie qui se précise. Jeudi 10 décembre, le ministre iranien de la Défense a assuré qu’il soutiendrait toutes les guerres contre Israël, "jusqu’à la libération de Jérusalem" (...)
"Barack Obama pensait encore il y a un an que la résolution du conflit israélo-palestinien permettrait de défléchir les tensions dans la région, et calmerait les Iraniens auxquels il tendait alors la main. Sa stratégie a échoué, l’Amérique sait qu’il doit en changer. (...)
"Barack Obama sait qu’un "Munich nucléaire" est impossible. Il sait aussi, avec les autres membres du Conseil de sécurité, que les sanctions ne seraient pas simples à appliquer et qu’elles auraient d’abord des conséquences directes sur le peuple iranien.
"Jeudi 10 décembre, accusé par Téhéran d’avoir fait enlever des citoyens iraniens, Barack Obama était en Suède pour recevoir le Prix Nobel de la Paix. Premier Nobel récompensé pour ses travaux "à venir", il n’a pas manqué de justifier sa politique en Afghanistan.
"Si la guerre est horrible, la servitude est pire", écrivait Winston Churchill.
Nous serions donc revenus -en pire, puisque l’Iran aurait entre temps progressé vers l’arme nucléaire- à la situation de l’automne 2007 qui avait motivé un Appel aux Européens pour empêcher la guerre contre l’Iran lancé ici-même et dans Libération par Michel Rocard, Yehuda Atai et Jean-Marie Matagne.
Il se trouve que la veille du jour où Guy Senbel pronostiquait une guerre inéluctable contre l’Iran, les mêmes auteurs ont à nouveau cosigné, cette fois dans les colonnes de Ouest-France, sous le titre Pour un Moyen-Orient sans armes nucléaires, un article dans lequel ils n’excluent pas le risque de guerre mais réaffirment l’unique solution raisonnable à leurs yeux : une solution diplomatique globale traitant, avec l’apport de chaque partie concernée, l’ensemble des problèmes du Moyen-Orient, le transformant en une zone exempte de toute arme de destruction massive, et garantissant à la fois aux Israéliens et aux Palestiniens une paix juste et durable dans le cadre de deux Etats aux frontières sûres et universellement reconnues - donc aussi reconnues par l’Iran.
Mais cela impliquerait qu’Israël accepte de mettre sur la table ses armes nucléaires. Un postulat que probablement Guy Senbel ne partage pas - nous lui avons offert de lui ouvrir nos colonnes, à charge de réciprocité, pour qu’il s’en explique. Des armes dont aucun officiel israélien ne parle jamais (excepté, un court instant, leur père putatif, Shimon Pérès), des armes dont chacun sait qu’elles existent tout en n’existant pas officiellement, des armes dont Guy Senbel ne parle pas non plus, n’ayant d’yeux que pour celles de l’Iran, qui n’existent pas encore. Il n’est certes pas souhaitable que le régime islamique iranien et son président accèdent à la bombe atomique. Le régime prétend ne pas le vouloir tout en laissant paraître des indices du contraire. Mais ceux qui l’en accusent le savent bien en leur for intérieur : ce sont leurs propres armes qui auront justifié, ou du moins motivé les siennes. C’est ce que les membrs du Comité israélien pour un Moyen-Orient sans armes nucléaires, biologiques et chimiques, ont compris depuis longtemps. Il est dommage qu’ils aient été si peu entendus dans leur propre pays.
Selon Guy Senbel, Obama "sait aussi, avec les autres membres du Conseil de sécurité, que les sanctions ne seraient pas simples à appliquer et qu’elles auraient d’abord des conséquences directes sur le peuple iranien". Mais il faudrait n’avoir rien retenu de l’offensive "Plomb durci" pour croire ou feindre de croire que les bombardements dont on menace l’Iran n’auront pas "des conséquences directes sur le peuple iranien".