[www.acdn.net] > Abolition des armes nucléaires : lettre au Président de la République
[ http://www.acdn.net/spip/spip.php?article565 ]

www.acdn.net > Accueil > Actualités > Les lettres d’ACDN >


Abolition des armes nucléaires : lettre au Président de la République




Publié le 22 janvier 2010

Copie au Premier ministre, au ministre des Affaires Etrangères et au ministre de la Défense

Saintes, le 22 janvier 2010

OBJET : Engagement de la France pour l’abolition des armes nucléaires.

Monsieur le Président,

Depuis l’entrée en vigueur du Traité de Non Prolifération nucléaire (TNP) en 1970, les Etats Dotés d’Armes Nucléaires auraient dû, d’après l’article VI du Traité, négocier de bonne foi l’élimination de tous leurs arsenaux. La Cour Internationale de Justice de la Haye a rappelé cette obligation dans son avis consultatif du 8 juillet 1996. Mais les Etats nucléaires parties au TNP n’ont jamais entrepris la moindre négociation ni tenu la moindre réunion en vue d’y parvenir.

De ce fait, aujourd’hui la planète est face à un double danger : l’acquisition d’armes nucléaires par de nouveaux pays (prolifération horizontale) et la modernisation de ces armes par ceux qui en ont déjà, comme le fait la France (prolifération verticale). Résultat : la menace d’un confit nucléaire, voulu ou accidentel mais dans tous les cas catastrophique, pèse en permanence sur l’humanité. Les présidents Obama et Medvedev ont d’ores et déjà reconnu que les milliers d’armes nucléaires dont ils disposent, et qui peuvent partir en quelque minutes, n’assurent en rien la sécurité de leurs concitoyens, mais compromettent gravement celle du monde. C’est pourquoi leurs diplomates négocient actuellement des réductions considérables de leurs arsenaux, dans le cadre d’un nouveau traité de désarmement destiné à faire suite au traité START et à s’inscrire dans un processus d’élimination totale.

Les centaines d’armes françaises ont les mêmes défauts que les russes, les américaines, les chinoises ou les israéliennes. Ce sont des armes criminelles et suicidaires, « fondamentalement dangereuses, extraordinairement coûteuses, militairement inefficaces et moralement indéfendables », comme l’a dit le général Lee Butler, dernier chef du Strategic Air Command. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, nulle part « l’assurance-vie de la Nation » ne réside dans sa « force de frappe ». Ainsi, la France pourrait faire, théoriquement, près d’un milliard de morts. Mais nul ne peut souhaiter devenir acteur ou complice d’un tel crime contre l’humanité, ni en devenir, en cas de conflit, la victime par réciprocité. Pour protéger la vie des hommes plutôt que les profits des marchands d’armes, la France doit donc soutenir un processus universel et strictement contrôlé d’abolition des armes nucléaires.

L’abolition est devenue possible. A Prague en avril 2009, tirant les leçons de la fin de la guerre froide, le président Obama, au nom des Etats-Unis, a proposé cet objectif à la Russie et à l’ensemble de la communauté internationale, qui l’a accueilli favorablement, comme en mai 2009 lors de la réunion préparatoire à la VIIIe Conférence d’examen du TNP. Et le 24 septembre 2009, un Conseil de sécurité de l’ONU exceptionnel a adopté à l’unanimité une résolution se fixant pour objectif « un monde sans armes nucléaires ». Mais à aucun moment de votre intervention devant vos pairs, vous n’avez dit que la France était prête, pour sa part, à s’y engager. La Conférence d’examen qui aura lieu à New York en mai 2010 devrait en être l’occasion, ce qui ouvrirait une première étape, capitale, vers l’abolition des armes nucléaires et la mise en œuvre d’une autre conception de la sécurité internationale.

Depuis 10 ans, les ONG ont travaillé à un modèle de convention d’élimination des armes nucléaires. Par son vote du 26 avril 2009, le Parlement Européen a affirmé souhaiter une telle convention en vue d’éliminer toutes les armes nucléaires d’ici à 2020, comme le demandent les Maires pour la Paix et le maire d’Hiroshima. Cette convention, déposée comme document officiel de l’ONU par la Malaisie et le Costa Rica, est soutenue aujourd’hui par 127 pays, dont la France ne fait pas encore partie.

C’est pourquoi nous vous demandons, Monsieur le Président, ainsi qu’au gouvernement, d’engager la France fermement pour l’abolition des armes nucléaires, de soutenir à l’ONU la Convention d’élimination, et de préparer la suspension des programmes français d’armement nucléaire. Si vous doutez que les Français le veuillent, permettez-nous cette suggestion : faites un référendum.

Pour ACDN

Jean-Marie Matagne, Président