Mercredi 15 septembre à Saintes, une quarantaine de personnes alertées la veille ou le jour même ont répondu à l’appel d’ACDN, de la Chorale Humanitaire et du Mouvement de la Paix. Elles se sont rassemblées à 18 heures sur la prairie de la Palu devant les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki, afin de protester contre les actes de vandalisme commis contre les plaques commémorant les victimes des bombardements du 6 et du 9 août 1945.
Le maire, Jean Rouger, était à la même heure avec des parents d’élèves à l’Inspection Académique de La Rochelle, pour tenter de sauver une classe primaire menacée de fermeture parce qu’il manquait un seul élève. Excusé, le maire s’était fait représenter par Catherine Gaillard-Remontet, conseillère municipale en charge du site de la Palu. Celle-ci a exprimé la détermination de la municipalité -qui va porter plainte contre X- à effacer au plus vite les traces de vandalisme.
Photo ACDN
Provisoirement, les plaques sabotées ont été nettoyées de leurs graffiti et remises en place au cours de la cérémonie, et dès le lendemain, les services de la Ville devaient s’employer à les sceller en renforçant leur ancrage, et à mettre davantage en valeur les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki.
Plusieurs adjoints au maire (Martine Tiberj, Margarita
Sola, Christian Couillaud, Sylvie Barre, Thierry Leblan...), également retenus ailleurs par leurs obligations, avaient tenu à se faire excuser et exprimer leur soutien malgré l’extrême brièveté du délai, la lettre d’ACDN leur étant parvenue quelques heures plus tôt.
Catherine Quéré, députée de la circonscription de Saintes et Saint Jean d’Angély, en session à l’Assemblée Nationale, en avait fait autant.
D’autres témoignages de sympathie nous sont parvenus et continuent de nous parvenir, y compris de l’étranger.
On notait la présence d’une Conseillère de la précédente municipalité, Bridgett Brennan, tandis qu’une conseillère d’opposition récemment démissionnaire, Françoise Bleynie, avait exprimé son regret de ne pouvoir être présente à l’heure dite.
Georges Mounier et deux de ses compagnons représentaient l’Union Locale des Anciens Combattants. Le quotidien Sud Ouest était représenté (voir ci-dessous l’article de David Briand paru le 16 septembre et son article du 14 septembre), de même que les deux hebdomadaires de la région, La Haute Saintonge et le Littoral.
L’Etat était, quant à lui, représenté par un fonctionnaire des ex-Renseignements Généraux. Espérons que l’actuel président de la République, qui tient entre ses mains le sort de 64 millions de Français et la vie de près d’un milliard d’êtres humains, se laissera instruire par les propos tenus dont la teneur lui sera rapportée. En particulier par l’aveu de l’un de ses prédécesseurs à la tête de l’Etat, Valéry Giscard d’Estaing, qui, comme Jean-Marie Matagne l’a rappelé, révèle dans ses mémoires (Le pouvoir et la vie, Tome 2) qu’il s’était secrètement résolu à ne jamais employer en premier l’arme nucléaire, de peur de provoquer l’anéantissement de la France, lui préférant, s’il le fallait, une nouvelle occupation militaire. Ce qui revient à condamner l’ensemble de la stratégie française dite de "dissuasion nucléaire".
Espérons donc que Nicolas Sarkozy décidera en urgence de renoncer à la "dissuasion nucléaire", comprenant enfin que "l’assurance-vie de la nation", selon la formule qu’il répétait encore le 10 juillet dernier, est en réalité son assurance-décès.
Si tel était le cas, cet acte de vandalisme imbécile, indigne et scandaleux, commis à Saintes mais dont on a peine à croire qu’il puisse être l’acte d’un saintais, aurait au moins servi à quelque chose...
Quoi qu’il en soit, on peut dire que Saintes réaffirme aux survivants d’Hiroshima et de Nagasaki sa solidarité et sa détermination à partager et poursuivre leur combat pacifique pour un monde libéré des armes nucléaires.
LETTRE D’ACDN AU CONSEIL MUNICIPAL DE SAINTES
Saintes, le 14 septembre 2010
par lettre en mairie
par courriel
Monsieur le Maire
Mmes et MM. les Adjoints et Conseillers
municipaux de la ville de Saintes
Mesdames et Messieurs,
L’enquête de police diligentée par Monsieur le Maire et la plainte contre X déposée par ses soins permettront peut-être d’établir l’identité du ou des responsables de l’acte de vandalisme dont les plaques gravées placées devant les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki ont fait l’objet à la prairie de la Palu.
Même si les dégâts sont réparables et même s’il ne s’agit que d’un acte isolé, il n’échappe à personne, du fait notamment (...) des inscriptions laissées sur les plaques (« God bless America !!! », « USA winners ! »), qu’il est intentionnel et dirigé contre la politique favorable au désarmement nucléaire poursuivie par la Ville depuis plus de dix ans et décidée unanimement par son Conseil municipal.
C’est en effet à l’unanimité que le Conseil a décidé en juin 2000, sur proposition du maire Michel Baron, l’adhésion de Saintes au réseau mondial « Abolition 2000 », et c’est encore à l’unanimité qu’il a décidé en mars 2008 d’adhérer au réseau des « Maires pour la Paix », deux réseaux qui travaillent ensemble à l’abolition des armes nucléaires au niveau mondial.
La Ville a apporté son soutien moral et matériel à l’organisation des 1e Journées du Désarmement Nucléaire (JDN) en mai 2001, des 1e, 2e et 3e Rencontres internationales pour le désarmement nucléaire, biologique et chimique (RID-NBC) en 2004, 2006 et 2008 ; au cours des deux dernières rencontres, les arbres d’Hiroshima puis de Nagasaki ont été plantés.
La Flamme pour le Désarmement Nucléaire, allumée pendant les JDN de 2001 par Mme Schmitt, Maire de Saintes, a été rallumée depuis périodiquement par des édiles de différentes couleurs politiques. C’est la première flamme dans le monde à avoir été allumée à cette fin, après la « Flamme de la Paix » qui brûle en permanence à Hiroshima.
En juillet 2004, la Mission d’Hiroshima pour la Paix dans le monde (Hiroshima World Peace Mission), en visite en Europe, a souhaité venir spécialement à
Saintes. Retenue par la réception d’un ministre, Mme Schmitt n’a pu accueillir la délégation à l’Hôtel de Ville, mais elle était représentée par Mme Gacel, maire-adjoint, et par son chef de cabinet, M. Texier. Composée de 9 personnes, la délégation comprenait deux survivants de la bombe (hibakusha) qui ont rallumé et porté à travers la ville la Flamme du Désarmement Nucléaire.
Depuis cette date, le maire d’Hiroshima (1,2 millions d’habitants) entretient des relations privilégiées avec Saintes (26 531 habitants en 2009). Par ailleurs président des Maires pour la Paix, qui regroupent aujourd’hui plus de 4000 villes dans le monde (dont une centaine en France), M. Tadatoshi Akiba a patronné les 3e RID-NBC, inaugurées avec un message lu par son envoyé personnel Pol d’Huyvetter, coordinateur de la campagne internationale Vision 2020 (« Plus aucune arme nucléaire d’ici 2020 »).
Un autre coordinateur international des Maires pour la Paix, Steve Leeper, suit de près les événements de Saintes. Citoyen américain, il travaille à Hiroshima. Il nous a demandé des précisions sur l’acte de vandalisme de la Palu, afin de rédiger un rapport aux autorités de la Ville.
Ces quelques rappels historiques donnent une idée de l’importance symbolique que peut revêtir, en France comme à l’étranger, la réaction des Saintais, de la Ville et de ses élus, au vandalisme dont les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki ont fait l’objet.
Peter Nicholls, universitaire britannique ayant participé aux 1e JDN et aux 1e RID-NBC, nous écrit ce matin : "Très triste. Mais je pense qu’un français ne peut pas faire comme ça. Only an American would write ’god bless america’. (...) I think it would be good if the acts were found to be not those of a Saintes resident."
Mais que ces actes soient ou non le fait d’un habitant de Saintes ou d’un simple visiteur, d’un Français ou d’un étranger, il importe avant tout que la ville s’en indigne et s’en démarque.
Un monde de paix, un monde sans guerre, un monde sans terreur, un monde sans armes de destruction massive, « un monde sans armes nucléaires », pour reprendre l’objectif unanime adopté par le Conseil de sécurité de l’ONU le
24 septembre 2009, n’est pas seulement souhaitable. Il est possible, pourvu que les populations s’emparent de la question. Les villes, qui sont aussi des cibles nucléaires, sont de plus en plus nombreuses à s’en saisir.
Saintes a fait ce choix et l’a réaffirmé avec constance depuis juin 2000, prouvant par là qu’il est possible de transcender les clivages politiques pour cette cause essentielle à la survie de l’humanité.
Mesdames, Messieurs les édiles de Saintes, c’est cet engagement commun et non partisan que vous pourrez renouveler solennellement en participant au rassemblement de protestation prévu ce mercredi 15 septembre à 18h sur le site de la Palu, devant les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki. Sachez que son écho portera loin.
S’il vous est impossible d’y participer physiquement, vous pouvez envoyer un message de solidarité qui sera lu pendant le rassemblement.
D’avance, merci.
Le bureau d’ACDN
Pour le bureau
Jean-Marie Matagne, Catherine Moreau, Jean-Philippe Chatain
ARTICLE DE SUD OUEST, 16 septembre 2010
Protestation pacifique
35 personnes ont dénoncé le vandalisme du site qui accueille deux arbres très symboliques.
Les plaques vandalisées seront remises en état aujourd’hui. PHOTO DAVID BRIAND
Trente-cinq personnes se sont rassemblées, hier, à 18 heures, à la prairie de la Palu, sur le site où sont implantés les deux arbres d’Hiroshima et de Nagasaki, dont les plaques ont été retrouvées descellées et à terre dimanche matin (« Sud Ouest » de mardi). Rappelons que sur les plaques avaient été inscrites, au feutre noir, ces inscriptions : « God bless America » (« Dieu bénisse l’Amérique ») et « USA winners » (« Les États-Unis vaincront »).
Soutien des élus
Trois associations - Action des citoyens pour le désarmement nucléaire (ACDN), la Chorale humanitaire et le Mouvement de la paix - avaient signé conjointement un communiqué appelant à ce mouvement de protestation contre l’atteinte à ces symboles pacifiques plantés en 2006 et 2008. Président d’ACDN, Jean-Marie Matagne a condamné le comportement de ou des auteurs de ces dégradations. « Tout le monde ou presque, aujourd’hui, est d’accord pour un monde sans arme nucléaire », a-t-il martelé, avant de fustiger « l’idéologie inhumaine et mortifère » des vandales.
« La mairie d’Hiroshima et les responsables des réseaux des maires pour la paix suivent de près ce qui se passe à Saintes », a-t-il poursuivi, citant encore les mots de soutien reçus de la part de la députée Catherine Quéré et de l’adjointe au maire de Saintes chargée de l’éducation, Martine Tiberj.
Chargée de la gestion de la prairie de la Palu, la conseillère municipale Catherine Gaillard-Remontet a assuré que les services techniques allaient remettre en état le site aujourd’hui. ACDN va, par ailleurs, déposer plainte contre X ce même jour.*
Saintes · Charente-Maritime · Catherine Quéré
* NOTE D’ACDN : Il s’avère que seuls les propriétaires d’un bien dégradé peuvent porter plainte pour la dégradation commise. S’agissant d’un bien appartenant à la commune et situé sur un domaine communal, seule la mairie est habilitée à porter plainte. C’est ce que le maire et la municipalité de Saintes ont décidé de faire. Ne pouvant s’associer à la plainte, ACDN suivra les résultats de l’enquête judiciaire par l’intermédiaire de la mairie.
ARTICLE DE SUD OUEST 14 septembre 2010 06h00 | Par David Briand
Des symboles vandalisés
Les faits ont été découverts dimanche matin. Les plaques gravées situées devant les deux arbres d’Hiroshima et Nagasaki, plantés dans la prairie de La Palu, ont été arrachées avec leur socle en ciment. Sont écrites au feutre noir, sur ces plaques, deux inscriptions en anglais : « God bless America ! » (« Dieu bénisse l’Amérique ! ») et « USA winners ! » (« Les USA vaincront ! »).
Ces actes de vandalisme ont fait aussitôt réagir Jean-Marie Matagne, président d’ACDN (Action des citoyens pour le désarmement nucléaire). Dans un communiqué, il rappelle aux vandales que « le président des États-Unis, Barack Obama, est parti en croisade pour un monde sans armes nucléaires. Le ou les vandales de la Palu semblent vouloir l’ignorer. L’Amérique fiévreuse dont ils se réclament ne mérite aucune bénédiction, ni humaine, ni divine ».