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Nucléaire : Israël pourrait attaquer l’Iran en mars 2006

Publié le 12 décembre 2005

Courrier international - 12 déc. 2005

Philippe Randrianarimanana et Hoda Saliby
Revue de presse

The Sunday Times affirme que Tel-Aviv se prépare à bombarder l’Iran pour l’empêcher d’acquérir l’arme nucléaire. Une perspective catastrophique pour la paix et la sécurité au Moyen-Orient, alors que la communauté internationale est divisée sur la conduite à adopter avec la république islamique d’Iran.

"Les forces armées israéliennes ont reçu l’ordre du Premier ministre Ariel Sharon de se préparer à d’éventuelles frappes sur des sites secrets d’enrichissement de l’uranium en Iran à la fin du mois de mars prochain", rapporte The Sunday Times. Citant des sources militaires israéliennes, le journal britannique précise que cette option militaire a été envisagée côté israélien après la découverte de présumés sites nucléaires iraniens camouflés en infrastructures civiles.

"La fin du mois de mars marquerait ’un point de non-retour’ au-delà duquel l’Iran disposera de l’expertise technique lui permettant d’enrichir l’uranium en quantité suffisante pour construire une tête nucléaire dans les deux à quatre années suivantes", rapporte The Sunday Times à partir de sources du ministère de la Défense israélien. Israël tient ses informations de ses activités de surveillance depuis une base située dans le Kurdistan irakien, mais aussi grâce à des opérations de renseignement menées sur le territoire iranien. Certaines unités d’élite de l’armée israélienne seraient déjà en état d’alerte maximale.

Les informations publiées par The Sunday Times ont été reprises et commentées dans la presse israélienne. Ainsi, le Jerusalem Post titre qu’"Israël dément les plans d’attaque contre l’Iran". Le journal israélien de droite rapporte les propos tenus à la radio par le chef du département de la politique étrangère au ministère de la Défense israélien, Amos Gilad, affirmant qu’"une opération miltaire sur des sites nucléaires iraniens ne pouvait pas être menée, dans la mesure où Israël participe aux efforts diplomatiques internationaux sur la question de la menace iranienne". Par ailleurs, le porte-parole d’Ariel Sharon, Ra’anan Gissin, a déclaré qu’"Israël n’a pas l’intention de lancer une attaque contre l’Iran, tant que toutes les options diplomatiques n’auront pas été épuisées".

L’effervescence actuelle entourant la question du nucléaire iranien survient au moment où le chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Mohamed El-Baradei, a reçu, samedi 10 décembre à Oslo, le prix Nobel de la Paix pour son action au sein de cette organisation des Nations unies de lutte contre la prolifération nucléaire. "Vous ne pouvez pas utiliser la force pour empêcher un pays d’obtenir l’arme nucléaire. En le bombardant massivement, vous ne faites que repousser l’échéance, car il reviendra pour demander vengeance", a averti El-Baradei sans mentionner Israël. Au mois de mars 2006, El-Baradei devrait remettre un rapport crucial sur l’Iran.

Reste que les efforts pour dissuader Téhéran de mener son programme nucléaire comme il l’entend sont dans l’impasse. Aucune date n’est avancée pour la reprise des négociations engagées par la troïka européenne Paris-Londres-Berlin. De plus, Téhéran a rejeté l’offre de Moscou de fourniture d’uranium enrichi produit sur le sol russe. "D’après les experts, le refus de Téhéran favorisera le transfert du dossier nucléaire iranien au Conseil de sécurité des Nations unies, sans que Moscou et les autres pays qui coopèrent avec la République islamique puissent s’y opposer", souligne la Nezavissimaïa Gazeta. Pour le quotidien moscovite, la Russie, qui a récemment signé avec l’Iran un accord sur la fourniture de systèmes de défense antiaérienne, se trouve dans une position ambiguë. "La situation de l’Iran se complique en raison de la rhétorique belliqueuse du président Ahmadinejad à l’encontre d’Israël." En cas de frappes israéliennes sur l’Iran, le journal évoque le risque que "des milliers de spécialistes et hommes d’affaires russes [présents en Iran] en soient victimes".

"La guerre des déclarations et des fuites médiatiques orchestrées bat son plein entre l’Iran et Israël. Cette guerre prépare le terrain à une confrontation militaire qui risque d’être infernale pour le Moyen-Orient, dans la mesure où le recours à des armes non conventionnelles est en jeu", souligne l’éditorialiste d’Al-Quds Al-Arabi. Pour le moment, estime le quotidien panarabe édité à Londres, "ces fuites médiatiques tendent à confirmer l’existence de plans israéliens, approuvés par les Etats-Unis, pour frapper militairement les installations nucléaires iraniennes avant que le programme n’aboutisse, à l’instar de l’attaque israélienne qui a détruit en 1981 les installations nucléaires en Irak. Par ailleurs, ces mêmes fuites sont destinées à exercer des pressions sur l’Iran afin qu’il abandonne son programme nucléaire."

Cependant, "l’Iran est encore en position de force. En effet, les 150 000 soldats américains stationnés en Irak sont des otages que Téhéran peut atteindre par le biais de ses alliés en Irak. De plus, l’Iran dispose de missiles qui peuvent atteindre le territoire israélien et il peut se défendre en cas de frappe militaire israélienne. Par ailleurs, les alliés de l’Iran au Liban et en Syrie n’hésiteront pas à se venger en provoquant une escalade militaire sur la frontière avec Israël." Enfin, poursuit Al-Quds Al-Arabi, "la communauté internationale ne peut pas permettre à Israël de l’entraîner dans une nouvelle guerre au Moyen-Orient, exacerbant la violence et le terrorisme, et, qui plus est, menaçant son approvisionnement en pétrole".