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Mission de l’ONU d’établissement des faits après l’offensive sur Gaza
Rapport Goldstone : Les droits de l’homme en Palestine
Conclusions et recommandations


Publié le 25 octobre 2009

Le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU avait confié à une mission de quatre experts dirigée par le juge sud-africain Richard Goldstone, précédemment connu pour ses enquêtes impartiales sur les atteintes aux droits de l’Homme dans différents pays, le soin d’enquêter sur les faits en relation avec l’offensive israélienne baptisée "Plomb durci" contre la Bande de Gaza (27 décembre 2008-18 janvier 2009). Après plusieurs mois d’enquête sur le terrain et à distance, ce rapport a été remis le 29 septembre 2009 au Conseil des Droits de l’Homme, qui l’a discuté et adopté à une large majorité le 16 octobre et l’a transmis au Conseil de sécurité de l’ONU, qui doit l’examiner cette semaine.

Au moment où le Congrès américain s’apprête à voter une motion conjointe des Républicains et des Démocrates demandant à Barack Obama et Hillary Clinton de rejeter catégoriquement le rapport Goldstone, que les signataires de cette motion accusent d’être "unilatéralement contre Israël" et "d’ignorer les milliers de tirs de roquettes sur Israël" (selon une dépêche de l’agence de presse Guysen International News en date du 25 octobre 2009), nous pensons utile de présenter à nos lecteurs dans leur intégralité - y compris par conséquent les §§ 1950 à 1956 - les conclusions et recommandations auxquelles ce rapport de 575 pages est parvenu.


GE.09-15837 (F) 290909 290909
NATIONS
UNIES A
Assemblée générale
Distr.
GÉNÉRALE
24 septembre 2009
FRANÇAIS
Original : ANGLAIS

CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME

Douzième session
Point 7 de l’ordre du jour

LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME EN PALESTINE ET
DANS LES AUTRES TERRITOIRES ARABES OCCUPÉS

Rapport de la Mission d’établissement des faits de
l’Organisation des Nations Unies sur le conflit de Gaza

Conclusions et recommandations *

* Le présent document est une traduction du texte préliminaire et ne contient que les conclusions
et recommandations de la Mission. Le rapport complet sera publié sous la cote A/HRC/12/48
dans toutes les langues, en fonction de la capacité des services de traduction de l’Organisation
des Nations Unies.


A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
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CINQUIÈME PARTIE :
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

XXX. CONCLUSIONS

A. Observations finales

1874. Une évaluation objective des événements sur lesquels la Mission a enquêté, sur
leurs causes et sur leur contexte est absolument indispensable si l’on veut rendre justice
aux victimes de violations et parvenir à la paix et la sécurité dans la région et à ce titre elle
est dans l’intérêt de tous ceux que concerne cette situation et qu’elle touche, y compris les
belligérants qui poursuivent les hostilités. C’est dans cet esprit, et en mesurant
parfaitement toute la complexité de sa tâche, que la Mission a accueilli et rempli son
mandat.

1875. La communauté internationale, de même qu’Israël et, dans la limite de leurs
pouvoirs et de leurs moyens, les autorités palestiniennes, ont le devoir de protéger les
victimes de violations et de faire en sorte qu’elles ne continuent pas à souffrir du fléau de la
guerre, de l’oppression et des humiliations de l’occupation ou d’attaques aveugles à la
roquette. Les Palestiniens ont le droit de déterminer librement leur régime politique et leur
système économique, y compris celui de résister à la privation par la force de leur droit à
l’autodétermination et de leur droit de vivre, dans la paix et la liberté, dans leur propre
État. Les Israéliens ont le droit de vivre en paix et en sécurité. Les deux peuples ont droit à
la justice, conformément au droit international.

1876. Pour s’acquitter de son mandat, la Mission s’en est remise, pour seuls guides, au
droit international général, au droit international humanitaire et au droit international des
droits de l’homme, ainsi qu’aux obligations qu’ils imposent aux États, à celles qu’ils
assignent aux acteurs non étatiques et surtout aux droits et titres qu’ils confèrent à la
personne. Cela n’implique aucunement que la position d’Israël, Puissance occupante, soit
assimilable à celle de la population palestinienne occupée ou des entités qui la représentent.
Les différences qui les séparent, en ce qui concerne le pouvoir et la capacité d’infliger des
dommages ou de protéger, et notamment d’assurer la justice en cas de violation, sont
évidentes, et la comparaison ne peut ni ne doit être faite. Ce qui, en revanche, exige autant
d’attention que d’efforts, c’est la protection de toutes les victimes, en conformité du droit
international.

B. Les opérations militaires israéliennes à Gaza : pertinence et liens
avec la politique d’Israël vis-à-vis du territoire palestinien occupé

1877. La Mission considère que l’opération militaire menée par Israël à Gaza entre le
27 décembre 2008 et le 18 janvier 2009 et son impact ne sauraient se comprendre ni
s’apprécier indépendamment des événements antérieurs et postérieurs. Cette opération
s’inscrit dans une série ininterrompue de mesures axées sur les objectifs politiques d’Israël
concernant Gaza et l’ensemble du territoire palestinien occupé. Beaucoup d’entre elles
reposent sur des violations du droit international humanitaire et de celui des droits de
l’homme, ou y aboutissent. Les objectifs militaires déclarés du Gouvernement israélien

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n’expliquent pas les faits établis par la Mission, pas plus qu’ils ne cadrent avec les
pratiques qu’elle a mises au jour au cours de son enquête.

1878. La manifestation la plus immédiate de cette continuité est la politique de blocus qui
a précédé les opérations en question et qui, aux yeux de la Mission, se ramène à un
châtiment collectif, intentionnellement infligé par le Gouvernement israélien à la
population de la bande de Gaza. Au moment où les opérations ont débuté, celle-ci était
depuis près de trois ans soumise à un régime rigoureux de bouclages et de restrictions à la
circulation des personnes, des biens et des services, qui s’appliquait aussi aux articles de
première nécessité comme les produits alimentaires et les fournitures médicales et à ceux
de la vie courante, tels que carburants et combustibles, électricité, fournitures scolaires et
matériaux de réparation et de construction. Ces mesures avaient été imposées par Israël
prétendument pour isoler et affaiblir le Hamas après sa victoire aux élections, à cause du
danger que celui-ci continuait à représenter à ses yeux pour sa sécurité. Leur effet s’est
trouvé amplifié par le retrait de la part de quelques donateurs de leur aide, financière
notamment, pour des motifs analogues. Ajoutant une épreuve pénible à la situation déjà
difficile qui régnait dans la bande de Gaza, les effets du blocus prolongé n’ont épargné
aucun des aspects de la vie de ses habitants. Dès avant l’opération militaire, l’économie de
Gaza avait été épuisée, le secteur de la santé totalement débordé et la population rendue
tributaire de l’aide humanitaire pour sa vie quotidienne et même sa survie. Femmes et
enfants souffraient des conséquences psychologiques de l’installation durable de la
pauvreté, de l’insécurité et de la violence, ainsi que d’un enfermement forcé dans un
territoire extrêmement surpeuplé. La dignité des habitants de Gaza était gravement
entamée. Telle était la situation dans la bande de Gaza lorsqu’en décembre 2008 les forces
armées israéliennes ont lancé leur offensive. Les opérations militaires et la manière dont
elles furent conduites ont considérablement exacerbé les effets indiqués ci-dessus du blocus.
Tout cela s’est traduit, en très peu de temps, par une atteinte durable sans précédent tant à
ses habitants qu’à leurs perspectives de relèvement et de développement.

1879. Selon la Mission, il ressort aussi de son analyse de leurs modalités et de leur impact
que les opérations militaires de décembre-janvier viennent à la suite d’un certain nombre
d’autres actions antérieures d’Israël à l’égard du territoire palestinien occupé. L’isolement
progressif de la bande de Gaza et sa séparation d’avec la Cisjordanie, politique qui avait
débuté beaucoup plus tôt et avait été consolidée, en particulier, par l’imposition de
bouclages hermétiques, de restrictions à la liberté de circulation et finalement du blocus,
sont parmi les plus manifestes. En outre, plusieurs mesures adoptées par Israël en
Cisjordanie au cours et à la suite des opérations militaires menées à Gaza approfondissent
encore son emprise sur la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et indiquent une
convergence des objectifs avec les opérations. Il s’agit d’une augmentation des
expropriations de terres, démolitions de maisons, permis de démolir et permis de
construire dans les colonies, d’un renforcement et d’une officialisation des restrictions en
matière d’accès et de circulation frappant les Palestiniens, de l’institution de procédures
nouvelles et plus rigoureuses pour les habitants de la bande de Gaza souhaitant changer de
résidence pour s’établir en Cisjordanie. Les tentatives systématiques de blocage et de prise
en main des processus démocratiques autonomes des Palestiniens, par la mise en détention
de représentants politiques élus et de membres du Gouvernement et le châtiment de la
population de Gaza pour l’appui qu’il lui était reproché d’avoir fourni au Hamas, ont
atteint leur point culminant au cours de l’offensive de Gaza avec les attaques de bâtiments

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officiels, au premier rang desquels le Conseil législatif palestinien. Par leurs effets
cumulatifs, cette politique et ces actions font encore reculer la perspective d’une intégration
politique et économique de Gaza et de la Cisjordanie.

C. Nature, objectifs et cibles des opérations militaires israéliennes à Gaza

1880. Tant les Palestiniens que les Israéliens que la Mission a rencontrés ont insisté à
maintes reprises sur le fait que les opérations militaires menées par Israël à Gaza du
27 décembre 2008 au 18 janvier 2009 étaient qualitativement différentes de toutes les
actions militaires antérieures d’Israël dans le territoire palestinien occupé. Malgré la
situation difficile qui règne depuis longtemps dans la bande de Gaza, les victimes comme
les observateurs de longue date ont dit que ces opérations étaient d’une gravité sans
précédent et que leurs conséquences se feraient longtemps sentir.

1881. Lorsque la Mission s’est rendue pour la première fois dans la bande de Gaza au
début de juin 2009, près de cinq mois s’étaient écoulés depuis la fin des opérations
militaires israéliennes. Les effets dévastateurs qu’elles avaient eus sur la population
sautaient cependant aux yeux. Outre les destructions visibles de maisons, usines, puits,
écoles, hôpitaux, postes de police et autres bâtiments publics, le spectacle de familles
entières, personnes âgées et enfants compris, vivant encore au milieu des débris de leur
ancien logement − la poursuite du blocus empêchant toute reconstruction − prouvait assez
l’impact prolongé des opérations sur les conditions d’existence de la population de Gaza.
Les informations relatives aux traumatismes subis à l’occasion des attaques, l’angoisse née
de l’incertitude de l’avenir, les difficultés de la vie et la crainte de nouvelles attaques étaient
autant de signes d’effets durables, moins tangibles mais non moins réels.

1882. Les femmes ont subi des atteintes importantes. Il faudra prêter une attention
particulière à leur situation si l’on veut tâcher de remédier aux conséquences du blocus, de
la poursuite de l’occupation et des dernières en date des opérations militaires israéliennes.

1883. Selon le Gouvernement israélien, les opérations militaires de Gaza avaient été
programmées dans toute leur ampleur et dans tous les détails. Il a beau avoir cherché à les
présenter essentiellement comme une réaction aux attaques à la roquette dans l’exercice de
son droit de légitime défense, la Mission considère que son plan visait, au moins en partie,
une cible différente, la population de Gaza dans son ensemble.

1884. En effet, lesdites opérations ne faisaient que donner corps à une politique globale
destinée à punir la population de Gaza de sa résilience et de son soutien visible au Hamas,
peut-être dans l’intention de la forcer à changer d’attitude. La Mission considère que cette
position est solidement fondée en fait, étant donné ce qu’elle a vu et entendu sur le terrain,
ce qu’elle a lu dans les déclarations de soldats qui avaient fait cette campagne et de ce
qu’elle a entendu et lu venant d’officiers et de dirigeants politiques qui sont ou ne sont plus
en activité mais qu’elle considère tous comme représentatifs de la pensée qui a inspiré la
politique et la stratégie sous-tendant les opérations militaires.

1885. La Mission n’ignore pas que, dans le sillage d’opérations militaires, les projecteurs
sont souvent braqués sur les morts − plus de 1 400 en tout juste trois semaines. Et c’est normal. Les rapports comme celui-ci ont en partie pour fonction de tenter, certes très

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modestement, de rendre leur dignité à ceux dont les droits ont été foulés aux pieds de la
manière la plus radicale qui soit : par la privation arbitraire de la vie. Il est important que
la communauté internationale affirme formellement et sans ambiguïté que cette violence
faite aux libertés et aux droits fondamentaux les plus élémentaires de la personne ne doit
pas être négligée, mais condamnée.

1886. À ce propos, la Mission est consciente qu’un décès n’est pas toujours constitutif de
violation du droit international humanitaire. Le principe de la proportionnalité reconnaît
que, dans certaines circonstances rigoureusement définies, des actes aboutissant à des
pertes civiles ne sont pas nécessairement contraires au droit. Ce qui rend l’application et
l’appréciation de la proportionnalité difficiles dans le cas de bien des événements sur
lesquels la Mission a enquêté, c’est que les faits des forces armées israéliennes comme les
propos tenus par les dirigeants militaires et politiques d’Israël avant et pendant les
opérations indiquent que, dans l’ensemble, ces évènements procédaient d’une politique de
recours délibérément disproportionné à la force, dirigée non pas contre l’ennemi, mais
contre "l’infrastructure de soutien". En pratique, il apparaît que cela signifiait la
population civile.

1887. Le moment choisi pour la première attaque israélienne, un jour de semaine à
11 h 30, alors que les enfants rentraient de l’école et que les rues de Gaza étaient envahies
de gens vaquant à leurs affaires, a visiblement été calculé pour susciter le plus grand
désordre et une panique généralisée dans la population civile. Le traitement infligé à de
nombreux civils arrêtés, voire tués, alors qu’ils essayaient de se rendre n’est que l’une des
manifestations de la façon dont les règles d’engagement, les instructions permanentes et les
consignes sur le terrain paraissent bien avoir été définies pour créer un climat dans lequel
le respect de la vie et de la dignité fondamentale de la personne dû à la population civile
cédait la place au mépris du droit international humanitaire et des normes relatives aux
droits de l’homme.

1888. La Mission sait parfaitement que les forces armées israéliennes, comme toute
armée qui tente d’agir dans le cadre du droit international, doivent absolument s’abstenir
de risquer indûment la vie de leurs soldats, mais cela ne leur permet pas pour autant de
transférer ce risque sur les hommes, femmes et enfants qui constituent la population civile.
Les principes fondamentaux de distinction et de proportionnalité s’appliquent sur le
champ de bataille, que celui-ci soit une zone bâtie urbanisée ou un espace en pleine nature.

1889. Aux yeux de la Mission, l’omission fréquente de la distinction entre combattants et
civils doit être mise sur le compte d’instructions données aux soldats, ainsi que quelques-uns
d’entre eux l’ont indiqué, et non pas de défaillances occasionnelles.

1890. La Mission n’ignore pas que certains de ceux qui ont été tués étaient des
combattants directement engagés dans les hostilités contre Israël, mais beaucoup n’en
étaient pas. À son sens, l’issue et les modalités de ces opérations indiquent qu’elles n’étaient
que partiellement destinées à tuer des dirigeants et membres du Hamas, des brigades
al-Qassam et autres groupes armés. Elles visaient aussi, dans une large mesure, à détruire
ou neutraliser les biens civils et les moyens de subsistance de la population civile.

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1891. Il ressort clairement des éléments recueillis par la Mission que la destruction
d’installations destinées aux approvisionnements alimentaires, systèmes d’épuration d’eau,
fabriques de béton et logements était le fruit d’une politique délibérée et systématique des
forces armées israéliennes. Ces objets ont été détruits, non pas parce qu’ils présentaient un
danger ou une occasion du point de vue militaire, mais pour rendre le déroulement
quotidien de l’existence et une vie dans la dignité plus difficiles à la population civile.

1892. Cette destruction systématique de l’appareil économique de la bande de Gaza s’est
apparemment assortie d’atteintes à la dignité de ses habitants. C’est ce que l’on a pu voir
avec le recours à des boucliers humains et les détentions illégales dans des conditions
parfois inadmissibles, mais aussi avec le saccage des maisons occupées et la façon dont leurs
habitants étaient traités dès le seuil par les occupants. Les graffiti sur les murs, les
obscénités et souvent les slogans racistes sont autant d’éléments illustrant l’humiliation et
la déshumanisation générales de la population palestinienne.

1893. Les opérations avaient été soigneusement planifiées dans toutes leurs phases. Des
avis et conseils juridiques furent dispensés à toutes les étapes de cette planification et à un
certain niveau opérationnel au cours de la campagne. Il n’y eut presque pas d’erreurs
commises, si l’on en croit le Gouvernement israélien. C’est ce qui amène la Mission à
conclure que ce qui s’est passé en à peine plus de trois semaines à la fin de 2008 et au début
de 2009 était une attaque délibérément disproportionnée visant à punir, humilier et
terroriser une population civile, à réduire considérablement la capacité de l’économie
locale de lui assurer du travail et de quoi subsister et de lui imposer un sentiment toujours
plus vif de dépendance et de vulnérabilité.

1894. La Mission a aussi relevé avec inquiétude les déclarations publiques de
représentants d’Israël, y compris de hauts responsables militaires, selon lesquelles les
attaques contre la population civile et la destruction de biens civils sont des moyens
légitimes de parvenir aux objectifs militaires et politiques d’Israël. La Mission estime que
de tels propos, outre qu’ils minent tout le régime du droit international, sont incompatibles
avec l’esprit de la Charte des Nations Unies et méritent par conséquent d’être
formellement dénoncés.

1895. Quelles que soient les violations du droit international humanitaire et de celui des
droits de l’homme qui ont pu être commises, le caractère systématique et délibéré des
activités exposées dans le présent rapport ne laisse à la Mission aucune possibilité de douter
que les premiers responsables sont ceux qui ont conçu, planifié, ordonné et supervisé les
opérations.

D. Occupation, résilience et société civile

1896. Les comptes rendus d’actes de violence plus graves commis au cours des récentes
opérations militaires ne masquaient pas le fait que la notion de « normalité », dans la bande
de Gaza, a été depuis longtemps redéfinie en raison de la situation prolongée d’abus et
d’absence de protection découlant de plusieurs décennies d’occupation.

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1897. La Mission s’étant attachée surtout à enquêter sur les questions précises entrant
dans son mandat et à les analyser, la poursuite de l’occupation de la bande de Gaza et de la
Cisjordanie est apparue comme le facteur fondamental sous-tendant les violations du droit
international humanitaire et de celui des droits de l’homme commises contre la population
protégée et compromettant pour elle toute perspective de développement et de paix.

En s’abstenant de reconnaître et d’exercer les responsabilités qui lui incombent en sa
qualité de Puissance occupante, Israël a encore exacerbé les effets de l’occupation sur le
peuple palestinien, et il continue. De plus, les pratiques aussi brutales qu’illicites de
l’occupation, loin d’étouffer la résistance, ne font que l’alimenter, y compris dans ses
manifestations violentes. La Mission considère que la fin de l’occupation est la condition
du retour des Palestiniens à une vie empreinte de dignité, comme du développement de
l’économie locale et d’un règlement pacifique du conflit.

1898. La Mission a été frappée par la résilience et la dignité dont la population a fait
preuve devant l’adversité. Le Directeur des opérations de l’UNRWA, John Ging, lui a
transmis la réponse d’un enseignant de Gaza au cours d’une conversation qui s’était
déroulée après la fin des opérations militaires israéliennes au sujet du renforcement de
l’éducation aux droits de l’homme dans les écoles. Au lieu de se déclarer sceptique quant à
l’intérêt d’enseigner les droits de l’homme dans un contexte où ces droits sont de nouveau
déniés, l’enseignant en question n’a pas hésité à se prononcer en faveur de la reprise de
l’éducation aux droits de l’homme : « Cette guerre est une guerre des valeurs, et nous
n’allons pas la perdre ».

1899. Le travail inlassable que fournissent les organisations non gouvernementales et les
organisations de la société civile palestiniennes pour soutenir la population dans des
circonstances aussi extrêmes et permettre aux souffrances et aux espérances des victimes
de violations de s’exprimer mérite d’être pleinement reconnu. Le rôle qu’elles jouent pour
aider à préserver la résilience et la dignité de la population ne saurait être surestimé.

La Mission a entendu maintes fois parler d’employés et bénévoles des ONG, médecins,
conducteurs d’ambulance, journalistes, ou observateurs des droits de l’homme qui, au plus
fort des opérations militaires, avaient risqué leur vie pour venir en aide à des gens dans le
besoin. Beaucoup ont fait part de l’angoisse suscitée par la nécessité de choisir de rester
près de leur famille ou de continuer à travailler pour d’autres personnes qui avaient besoin
d’assistance, et de se trouver ainsi bien souvent privés de nouvelles au sujet de la sécurité
ou des coordonnées de leurs proches. La Mission tient à rendre hommage au courage et à
l’oeuvre des très nombreuses personnes qui ont tant contribué à alléger les souffrances de la
population et à faire connaître les évènements de Gaza.

E. Attaques à la roquette et au mortier en Israël

1900. Depuis avril 2001, des groupes armés palestiniens ont lancé des milliers de
roquettes et de mortiers en Israël, ce qui a semé la terreur au sein de la population civile
israélienne, comme en témoigne le nombre de traumatismes psychologiques dans les
communautés touchées. Ces attaques ont également causé une détérioration de la vie
sociale, culturelle et économique des populations dans le sud d’Israël et porté atteinte au
droit à l’éducation des dizaines de milliers d’enfants et de jeunes adultes qui prennent des
cours dans les zones touchées.

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1901. Au cours de la période couverte par le mandat de la Mission, ces attaques ont fait
quatre morts et des centaines de blessés. Le fait qu’il n’y ait pas eu davantage de victimes
est imputable à la fois à la chance et aux mesures prises par le Gouvernement israélien,
notamment la fortification d’édifices publics, la construction d’abris et, lors de la
recrudescence des hostilités, la fermeture d’écoles.

1902. La Mission note avec préoccupation qu’Israël n’a pas offert aux citoyens
palestiniens touchés le même niveau de protection contre les roquettes et les mortiers
qu’aux citoyens juifs. En particulier, il n’a pas fourni d’abris publics ni fortifié les écoles,
par exemple dans les communautés palestiniennes vivant dans les villages « non reconnus »
et certains villages « reconnus ». Il devrait aller sans dire que les milliers d’Israéliens
palestiniens − dont un grand nombre d’enfants − qui vivent dans le rayon d’action des tirs
de roquette, méritent la même protection que celle offerte par le Gouvernement israélien
aux citoyens juifs.

F. Divergences d’opinion en Israël

1903. Si l’offensive militaire israélienne à Gaza a été largement soutenue par le public
israélien, il existait aussi des voix dissidentes qui se sont exprimées sous la forme de
manifestations, de protestations et par la publication d’informations sur la conduite
d’Israël. La Mission estime que les mesures prises par le Gouvernement israélien pendant
et après les opérations militaires dans la bande de Gaza, notamment les interrogatoires de
militants politiques, la répression des critiques et des sources de critique potentielle des
opérations militaires d’Israël, en particulier des ONG, ont contribué pour beaucoup à
créer un climat politique où aucun désaccord avec le Gouvernement et son action dans le
territoire palestinien occupé n’est toléré. Le fait que les médias se sont vu refuser l’accès à
Gaza et que cet accès continue d’être refusé aux observateurs des droits de l’homme
constitue, de l’avis de la Mission, une tentative visant à soustraire les actions du
Gouvernement dans le territoire palestinien occupé à la vue du public et à empêcher la
réalisation d’enquêtes et la publication d’informations sur la conduite des parties au conflit
dans la bande de Gaza.

1904. Dans ce contexte d’intolérance accrue des divergences d’opinions en Israël, la
Mission tient à rendre hommage aux ONG qui travaillent dans des conditions difficiles en
Israël et qui continuent avec courage d’exprimer leurs critiques des actes du Gouvernement
portant atteinte aux droits de l’homme et au droit international humanitaire. L’oeuvre de ces
organisations est indispensable non seulement pour veiller à ce que des informations
indépendantes parviennent au public israélien et international mais aussi pour encourager
un débat factuel sur ces questions au sein de la société israélienne.

G. L’incidence de la déshumanisation

1905. Comme c’est le cas dans bien des conflits, l’une des caractéristiques du conflit
israélo-palestinien est la déshumanisation de l’autre et des victimes en particulier. Le
psychiatre palestinien, le docteur Iyad al-Sarraj a expliqué ce cycle d’agression et de
victimisation qui fait que « aux yeux d’un soldat israélien, le Palestinien n’est pas un être
humain égal. Parfois [...] il devient même l’incarnation du diable [...] ». « Cette culture de
diabolisation et de déshumanisation » contribue à créer un état de paranoïa. « La paranoïa

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comporte deux facettes : d’une part, un sentiment de victimisation − je suis une victime de
ce monde, le monde entier est contre moi, et l’inverse, je suis supérieur à ce monde et je
peux l’opprimer − ce qui conduit à ce qu’il convient d’appeler "l’arrogance du pouvoir".
En tant que Palestiniens, nous voyons généralement dans les Israéliens l’incarnation du
diable. Nous pouvons haïr et ce que nous faisons est une simple réaction et nous pensons
que les Israéliens ne comprennent que le langage de la force. De leur côté, les Israéliens
disent la même chose de nous − nous ne comprenons que le langage de la violence ou de la
force. C’est là l’arrogance du pouvoir et [les Israéliens] s’en servent sans absolument
aucune considération d’humanité. À mon avis, nous nous trouvons non seulement dans une
situation de guerre mais aussi dans une situation qui relève de la culture et de la
psychologie. Je souhaite ardemment que les Israéliens amorcent (il existe un très grand
nombre de Juifs dans le monde et en Israël qui réfléchissent sur eux-mêmes) une prise de
conscience qui leur permettra d’atténuer leur crainte, parce qu’Israël vit dans la crainte
malgré tout son pouvoir − et qu’ils commencent à faire face aux conséquences de leur
propre victimisation et à traiter avec les Palestiniens comme des êtres humains à part
entière, égaux en droit avec les Israéliens. De leur côté, les Palestiniens doivent eux aussi se
regarder en face, se respecter et respecter leurs propres divergences afin de voir les
Israéliens comme des êtres humains à part entière dotés d’obligations et de droits égaux.
Voilà la voie à suivre pour parvenir véritablement à la justice et à la paix. »

1906. L’universitaire israélien, Ofer Shinar, est parvenu à des conclusions analogues :
« Le problème de la société israélienne tient au fait qu’en raison du conflit, elle se sent
victimisée, sentiment qui est largement justifié, et il lui est donc très difficile de se mettre à
la place de l’autre partie et de comprendre qu’elle aussi est une victime. C’est, à mon avis,
la plus grande tragédie du conflit qu’il est terriblement difficile de surmonter [...]. Je pense
que le fait de prendre l’initiative d’écouter [...] les gens [...] est très important. Le message
que la société israélienne reçoit est absolument sans équivoque : vous voyez de manière
impartiale que le sentiment de victimisation est partagé. Vous êtes tenus d’endosser cette
responsabilité car il vous faut comprendre combien il est difficile de faire passer ce message
à la société israélienne, à quel point cette société est fermée et combien elle a du mal à
admettre que l’autre partie n’est pas seulement la partie qui porte atteinte à nos droits de
l’homme mais que ses droits de l’homme sont également bafoués et combien elle souffre
aussi. »

1907. Dans l’exercice du mandat qui lui a été confié d’enquêter sur les violations du droit
international qui auraient été commises dans le cadre des opérations militaires menées à
Gaza en décembre 2008 et janvier 2009, la Mission s’est entretenue avec les personnes les
plus touchées par les événements survenus dernièrement dans un conflit qui dure depuis
des décennies. Comme on pouvait s’y attendre, la Mission a trouvé des populations
profondément marquées par le conflit et souffrant des traumatismes psychologiques graves
résultant d’une vie qui pourrait, à juste titre, paraître intolérable à ceux qui vivent dans
des pays plus paisibles.

1908. À la fois les Palestiniens et les Israéliens sont légitimement révoltés par la vie qu’ils
sont forcés de mener. Pour les Palestiniens, la colère que suscitent des événements précis
− victimes civiles, blessures et destructions à Gaza à la suite des attaques militaires, blocus,
poursuite de la construction du Mur hors des frontières établies en 1967 − vient alimenter
une colère sous-jacente contre la poursuite de l’occupation israélienne, ses humiliations

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quotidiennes et la non-réalisation du droit à l’autodétermination. Quant aux Israéliens, les
déclarations publiques des groupes armés palestiniens se réjouissant des attaques à la
roquette et au mortier visant des civils renforcent la crainte profondément ancrée que les
négociations ne serviront pas à grand chose et que leur nation continue de voir son
existence menacée, menace dont le pays ne peut que protéger son peuple. C’est ainsi qu’à la
fois les Israéliens et les Palestiniens partagent une crainte secrète − pour certains, une
conviction − que les uns n’ont pas l’intention de reconnaître le droit des autres à un pays
qui soit le leur. Cette colère et cette crainte sont malheureusement bien représentées par de
nombreux politiciens.

1909. Certains Israéliens ont signalé à la Mission que la politique de leur gouvernement
tendant à isoler la bande de Gaza et à resserrer les restrictions sur la circulation des
Palestiniens à l’intérieur du territoire palestinien occupé et entre ce territoire et Israël a
contribué à creuser l’écart entre les Palestiniens et les Israéliens, réduisant les occasions
d’échanges autres que dans les situations de contrôle et de coercition, par exemple aux
points de contrôle et aux postes militaires.

1910. Dans ce contexte, la Mission a été encouragée par les informations faisant état
d’échanges et de relations de coopération entre Palestiniens et Israéliens ; ainsi des
spécialistes de la santé mentale travaillaient avec des Palestiniens de Gaza et des
communautés du sud d’Israël, et une coopération existait entre Magen David Adom et la
Société palestinienne du Croissant-Rouge, en particulier en Cisjordanie, où un engagement
commun a été pris d’apporter une aide humanitaire aux communautés dans lesquelles ils
travaillent, quelle que soit l’appartenance ethnique du patient qu’ils sont appelés à traiter.

H. La situation entre Palestiniens

1911. Les discussions et la violence entre le Fatah et le Hamas, qui ont abouti à la
création d’entités et de structures de gouvernement parallèles dans la bande de Gaza et
en Cisjordanie, ont des répercussions néfastes sur les droits de l’homme de la population
palestinienne dans ces deux zones, et contribuent, outre les menaces liées à l’occupation
étrangère, à compromettre l’état de droit dans le territoire palestinien occupé. Bien que le
mandat de la Mission soit cantonné aux violations commises dans le contexte des
opérations militaires menées en décembre et janvier, le fait que les Palestiniens bénéficient
d’une protection moindre ressort des cas de privation arbitraire de la vie, des détentions
arbitraires de militants politiques ou de sympathisants, des limitations de liberté
d’expression et d’association et des abus commis par les forces de sécurité. La situation est
aggravée par le fait que l’appareil judiciaire joue un rôle sans cesse réduit pour assurer
l’état de droit et offrir des recours juridiques aux victimes de violations. Un règlement des
dissensions internes fondé sur le libre arbitre et le choix des Palestiniens sous ingérence
extérieure rendrait les autorités et institutions palestiniennes mieux à même de protéger les
droits de la population dont elles ont la charge.

I. Le besoin de protection et le rôle de la communauté internationale

1912. Le droit international énonce les obligations qu’ont les États non seulement de
respecter mais aussi d’assurer le respect du droit international humanitaire. La Cour
internationale de Justice a déclaré, dans son avis consultatif sur les conséquences

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page 11

juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, que « tous les
États parties à la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes
civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, ont en outre l’obligation, dans le respect de la
Charte des Nations Unies et du droit international, de faire respecter par Israël le droit
international humanitaire incorporé dans cette convention ».

1913. Dans son document final, le Sommet mondial tenu en 2005 a considéré qu’il
incombait également à la communauté internationale, dans le cadre de l’Organisation des
Nations Unies, de mettre en oeuvre les moyens diplomatiques et humanitaires et autres
moyens pacifiques appropriés, conformément aux Chapitres VI et VIII de la Charte, afin
d’aider à protéger les populations, notamment des crimes de guerre et des crimes contre
l’humanité. Le document final a souligné que les Membres de l’Organisation des Nations
Unies sont prêts à mener en temps voulu une action collective résolue par l’entremise du
Conseil de sécurité, conformément à la Charte, notamment son Chapitre VII, lorsque des
moyens pacifiques se révèlent inadéquats et que les autorités nationales n’assurent
manifestement pas la protection de leurs populations contre le génocide, les crimes de
guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité. Dans son rapport sur la mise
en oeuvre de la responsabilité de protéger, le Secrétaire général a indiqué en 2009 que
l’énumération de ces crimes « ne visait nullement à minimiser l’ensemble beaucoup plus
large d’obligations résultant du droit international humanitaire, du droit international des
droits de l’homme, du droit des réfugiés et du droit pénal international ».

1914. Après des décennies de conflit incessant, tant les Palestiniens que les Israéliens sont
soumis à des menaces toujours aussi fortes mais qui s’accompagnent désormais d’une
escalade constante de la violence, de la mort et des souffrances pour la population civile,
dont les opérations militaires menées à Gaza en décembre et janvier ne sont que l’exemple
le plus récent. Israël ne parvient pas lui non plus à protéger ses propres citoyens en
refusant de reconnaître combien il est futile de recourir à la violence et à la puissance
militaire.

1915. Les incursions et actions militaires d’Israël dans la bande de Gaza n’ont pas cessé
après la fin des opérations militaires de décembre et janvier.

1916. Le Conseil de sécurité a régulièrement inscrit la question de la protection des
populations civiles à son ordre du jour, estimant qu’il s’agit là d’un problème relevant de
sa responsabilité. La Mission fait observer que la communauté internationale est restée
pour l’essentiel silencieuse et n’a rien fait jusqu’ici pour assurer la protection de la
population civile dans la bande de Gaza et dans le territoire palestinien occupé en général.
Il suffit en effet de constater l’absence de réaction énergique devant le blocus et ses
conséquences, les opérations militaires à Gaza et, à la suite de ces opérations, les obstacles
qui ne cessent d’entraver l’effort de la reconstruction. La Mission estime aussi que
l’isolement des autorités de Gaza et les sanctions prises contre ce territoire ont eu un effet
négatif sur la protection de la population. Il convient sans aucun doute de prendre
immédiatement des mesures pour permettre les activités de reconstruction à Gaza.
Toutefois, il faut aussi que ces mesures s’accompagnent d’une prise de position plus ferme
par la communauté internationale à l’égard des violations du droit international
humanitaire et du droit des droits de l’homme ainsi que du long retard pris dans l’action
visant à mettre fin à ces violations. La protection des populations civiles exige que le droit

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page 12

international soit respecté et que les auteurs de violations soient comptables de leurs actes.
Lorsque la communauté internationale ne se conforme pas à ses propres normes
juridiques, la primauté du droit international est manifestement menacée, ce qui peut avoir
des conséquences incalculables.

1917. La Mission met en relief le rôle remarquable et essentiel joué par le personnel des
nombreuses institutions et organismes des Nations Unies, qui s’efforce d’apporter une
assistance à la population du territoire palestinien occupé dans tous les domaines de la vie
quotidienne. Un autre aspect troublant des opérations militaires menées en décembre et
janvier concernait le mépris, au cours de plusieurs incidents, dont certains sont
documentés dans le présent rapport, du caractère inviolable des locaux, installations et
fonctionnaires des Nations Unies. Il va sans dire que les attaques visant l’Organisation des
Nations Unies sont inadmissibles et compromettent la capacité de celle-ci de jouer le rôle de
protection et d’assistance qui lui revient à l’égard d’une population qui en a grand besoin.

J. Résumé des conclusions juridiques

1918. Une version plus détaillée des conclusions juridiques de la Mission figure dans les
chapitres du rapport correspondant aux faits et événements particuliers sur lesquels elles
portent. Les pages qui suivent offrent un résumé de ces conclusions.

1. Actions d’Israël à Gaza dans le contexte des opérations militaires menées
du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009

a) Précautions dans l’attaque

1919. La Mission conclut que, dans un certain nombre de cas, Israël s’est dispensé de
prendre toutes les précautions pratiquement possibles exigées par le droit coutumier et
visées au sous-alinéa ii) de l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 57 du Protocole
additionnel I en vue d’éviter et, en tout cas, de réduire au minimum les pertes en vies
humaines dans la population civile, les blessures aux personnes civiles et les dommages aux
biens de caractère civil. Les tirs d’obus contenant du phosphore blanc sur le complexe de
l’UNWRA dans la ville de Gaza constituent l’un de ces cas où les précautions requises
n’ont pas été prises quant au choix des moyens et méthodes d’attaque, et les actes en cause
ont été aggravés par une indifférence totale à leurs conséquences. Les tirs délibérés sur
l’hôpital Al-Qods et ses abords avec des obus explosifs brisants et des obus au phosphore
blanc violent quant à eux les dispositions des articles 18 et 19 de la quatrième Convention
de Genève. Quant à l’attaque contre l’hôpital al-Wafa, la Mission a conclu qu’elle
constituait une violation des mêmes dispositions ainsi que du droit coutumier qui interdit
les attaques dont on peut attendre qu’elles causent incidemment des dommages excessifs
aux personnes civiles et aux biens de caractère civil.

1920. La Mission conclut que les différents types d’avertissement donnés par Israël à
Gaza ne peuvent être considérés comme suffisamment efficaces dans les circonstances pour
être conformes au droit coutumier tel que l’exprime l’alinéa c) du paragraphe 2 de
l’article 57 du Protocole additionnel I. Quelques-uns des avertissements donnés par voie de
tracts étaient certes spécifiques, mais la Mission ne peut pas considérer comme efficaces
des messages plus généraux ordonnant aux civils de quitter les lieux quels qu’ils pussent

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 13

être où ils se trouvaient et de se rendre au centre-ville dans les circonstances particulières
d’une campagne militaire. Lancer des missiles contre des immeubles ou sur leur toit à titre
d’« avertissement » constitue essentiellement une pratique dangereuse et une forme
d’attaque et non pas un avertissement.

b) Incidents ayant fait des morts dans la population civile

1921. La Mission a constaté de nombreux cas d’attaques délibérées contre des personnes
civiles et des biens de caractère civil (individus, familles entières, habitations, mosquées)
qui ont causé des pertes en vies humaines et des blessures et violé le principe fondamental
du droit international humanitaire qu’est le principe de distinction. Dans ces cas, la
Mission a constaté que la protection statutaire due aux populations civiles n’avait pas été
respectée et que les attaques étaient délibérées, ce qui constitue une violation flagrante du
droit coutumier tel qu’il trouve son expression dans le paragraphe 2 de l’article 51 et dans
l’article 75 du Protocole additionnel I, dans l’article 27 de la quatrième Convention de
Genève et dans les articles 6 et 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Dans certains cas, la Mission a conclu en outre que l’attaque avait été lancée avec
l’intention de répandre la terreur parmi la population civile. De surcroît, dans plusieurs
des incidents sur lesquels la Mission a enquêté, les forces armées israéliennes non
seulement n’ont pas fait de leur mieux pour faciliter l’accès des organismes humanitaires
aux blessés ainsi que la fourniture de secours médicaux comme l’exige le droit international
coutumier tel que l’exprime le paragraphe 2 de l’article 10 du Protocole additionnel I, mais
encore ont fait obstacle à l’accès des organismes humanitaires.

1922. Dans un incident sur lequel elle a enquêté et dans lequel au moins 35 Palestiniens
ont été tués, la Mission a conclu que les forces armées israéliennes avaient lancé une
attaque dont un officier commandant raisonnable pouvait attendre qu’elle causerait dans
la population civile des pertes en vies humaines excessives par rapport à l’avantage
militaire attendu. Cette attaque constitue une violation des sous-alinéas ii) et iii) de
l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 57 du Protocole additionnel I. La Mission conclut
aussi à une violation du droit à la vie garanti par l’article 6 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques.

1923. La Mission conclut encore qu’en attaquant délibérément des postes de police et en
tuant un nombre élevé de policiers (99 dans les incidents sur lesquels la Mission a enquêté)
pendant les premières minutes de ses opérations militaires, Israël a violé le principe de
proportionnalité entre, d’une part, l’avantage militaire qu’il pouvait espérer en tuant
quelques policiers qui appartenaient peut-être à des groupes armés palestiniens, et, d’autre
part, les pertes en vies humaines subies par la population civile (c’est-à-dire la majorité des
policiers et des civils présents à l’intérieur et aux abords des postes de police).

c) L’utilisation de certaines armes par les forces armées israéliennes

1924. En ce qui concerne les armes utilisées par les forces armées israéliennes pendant
les opérations militaires, la Mission admet que le droit international n’interdit pas le
phosphore blanc, les fléchettes et les métaux lourds comme le tungstène. Leur emploi est
cependant soumis à des restrictions, voire interdit dans certaines conditions en vertu des
principes de proportionnalité et de précaution dans l’attaque. Les obus à fléchettes, qui

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page 14

sont des armes à forte capacité de dispersion, sont particulièrement contre-indiquées pour
un emploi dans des zones habitées ; de même, selon la Mission, l’emploi du phosphore
blanc, au moins comme agent fumigène, devrait être interdit en raison du nombre et de la
diversité des dangers associés au déploiement d’un agent pyrophorique de cette nature.

d) Traitement des Palestiniens par les forces armées israéliennes

i) Utilisation de boucliers humains

1925. La Mission a enquêté sur plusieurs incidents au cours desquels des militaires
israéliens se sont abrités derrière des Palestiniens pour entrer dans des maisons
susceptibles d’avoir été piégées ou d’héberger des combattants ennemis (cette pratique,
connue en Cisjordanie sous le nom de « procédure du voisin », était appelée « procédure de
Johnnie » pendant les opérations militaires à Gaza). La Mission a conclu que cette pratique
répond à la définition de l’utilisation de boucliers humains qui est interdite par le droit
international humanitaire. Elle viole aussi l’article 6 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, qui protège le droit à la vie, et son article 7, qui interdit les
traitements cruels et inhumains.

1926. Les interrogatoires de civils palestiniens sous la menace de mort ou d’atteintes à
leur intégrité corporelle pour obtenir d’eux des renseignements sur les combattants du
Hamas et d’autres combattants palestiniens ainsi que sur les tunnels contreviennent aux
dispositions de l’article 31 de la quatrième Convention de Genève, qui interdit l’exercice de
toute contrainte d’ordre physique ou moral à l’égard des personnes protégées.

ii) Détention

1927. La Mission a établi que les forces armées israéliennes ont raflé et détenu des
groupes importants de personnes protégées au sens de la quatrième Convention de Genève.
Elle estime que la détention de ces personnes ne peut se justifier ni au titre de la détention
de « combattants illégaux » ni au titre de l’internement pour des motifs impérieux de
sécurité. Elle considère que les graves sévices, les humiliations constantes, le traitement
dégradant et les déplorables conditions de détention qui auraient été infligées aux
personnes placées sous le contrôle des forces armées israéliennes à Gaza ou envoyées en
détention en Israël constituent une violation de l’obligation de traiter avec humanité les
personnes protégées visées à l’article 27 de la quatrième Convention de Genève et une
violation des dispositions des articles 7, 10 et 14 du Pacte international relatif aux droits
civils et politiques concernant, respectivement, la torture, le traitement des personnes
privées de leur liberté et les garanties d’une procédure régulière. Quant au traitement des
femmes pendant leur détention, il a été contraire au respect particulier dont les femmes
doivent faire l’objet selon le droit international coutumier tel que l’exprime l’article 76 du
Protocole additionnel I. La Mission conclut que les rafles de groupes importants de civils et
leur détention prolongée dans les conditions décrites dans le présent rapport constituent
une peine collective et violent donc les dispositions de l’article 33 de la quatrième
Convention de Genève et de l’article 50 du Règlement de La Haye. Ce traitement s’assimile
aux mesures d’intimidation ou de terrorisme interdites par l’article 33 de la Quatrième
Convention de Genève.

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e) Destruction de biens

1928. La Mission conclut que les attaques lancées contre le bâtiment du Conseil législatif
palestinien et la prison principale de Gaza constituent des attaques délibérées contre des
biens de caractère civil en violation de la règle de droit international humanitaire qui veut
que les attaques soient strictement limitées à des objectifs militaires.

1929. La Mission conclut également que les forces armées israéliennes ont attaqué de
façon illicite et arbitraire et détruit sans nécessité militaire un certain nombre de biens et
installations servant à la production ou au traitement de denrées alimentaires (notamment
une minoterie, des terres agricoles et des serres), des installations d’eau potable, des
exploitations agricoles et du bétail en violation du principe de distinction. Sur la base des
faits qu’elle a recensés, la Mission conclut que ces destructions ont été commises en vue
d’en priver, à raison de leur valeur de subsistance, la population civile, ce qui constitue une
violation du droit coutumier tel qu’il trouve son expression dans le paragraphe 2 de
l’article 54 du Protocole additionnel I. La Mission conclut en outre que les forces armées
israéliennes ont procédé à la destruction de maisons privées, de puits et de réservoirs d’eau
sur une grande échelle et de façon illicite et arbitraire.

1930. Outre qu’ils constituent des violations du droit international humanitaire, ces actes
de destruction commis à grande échelle et de façon arbitraire violent l’obligation faite à
Israël de respecter le droit des habitants de la bande de Gaza à un niveau de vie suffisant
pour eux-mêmes et leur famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement
suffisants, ainsi que le droit qu’ils ont de jouir du meilleur état de santé physique et
mentale qu’ils soient capables d’atteindre, ces deux droits étant garantis par les articles 11
et 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

f) Effets du blocus et des opérations militaires sur la population de Gaza

1931. La Mission conclut que la politique de blocus suivie par Israël contre la bande de
Gaza, et notamment la fermeture des postes frontière ou les restrictions qui les ont visés
pendant la période qui a précédé immédiatement les opérations militaires ont imposé à la
population locale des difficultés et des privations extrêmes qui constituent une violation des
obligations que la quatrième Convention de Genève met à la charge d’Israël en tant que
Puissance occupante. Cette politique a entraîné pour les Palestiniens de la bande de Gaza
un grave recul dans la réalisation de leurs droits économiques et sociaux et a endommagé le
tissu économique et social, en plaçant les services de santé, d’éducation, d’assainissement et
les autres services essentiels dans une situation très vulnérable qui les a empêchés de
soulager les effets immédiats des opérations militaires.

1932. La Mission conclut que, nonobstant les informations qu’Israël a diffusées sur les
dispositifs de secours humanitaire qu’il aurait mis en place pendant les opérations
militaires, Israël a en substance manqué à son obligation d’accorder le libre passage de tout
envoi de médicaments et de matériel sanitaire, de vivres et de vêtements nécessaires pour
satisfaire les besoins humanitaires urgents de la population civile dans le contexte des
opérations militaires, ce qui constitue une violation de l’article 23 de la quatrième

Convention de Genève.
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page 16

1933. En sus des conclusions générales qui précèdent, la Mission considère qu’Israël a
manqué aux obligations spécifiques qui découlent de la Convention relative aux droits de
l’enfant et de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à
l’égard des femmes, notamment celles qui concernent les droits à la paix et à la sécurité,
à la liberté de circulation, à des moyens de subsistance et à la santé.

1934. La Mission conclut que les conditions créées par les actions délibérées des forces
armées israéliennes et les politiques déclarées du Gouvernement vis-à-vis de la bande de
Gaza avant, pendant et après les opérations militaires témoignent dans leur ensemble
d’une intention de punir collectivement la population de la bande de Gaza. Elle conclut
donc à une violation des dispositions de l’article 33 de la quatrième Convention de Genève.

g) Infractions graves aux Conventions de Genève et faits engageant la responsabilité
pénale de leurs auteurs au regard du droit international pénal

1935. Sur la base des faits qu’elle a établis, la Mission conclut que des infractions graves
à la quatrième Convention de Genève ont été commises par les forces armées israéliennes à
Gaza : homicide intentionnel, torture ou traitements inhumains, le fait de causer
intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l’intégrité
physique ou à la santé, et destruction de biens non justifiée par des nécessités militaires et
exécutée sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire. En tant qu’infractions graves,
ces faits engagent la responsabilité pénale de leurs auteurs. La Mission note par ailleurs
que l’utilisation de boucliers humains constitue aussi un crime de guerre selon le Statut de
Rome de la Cour pénale internationale.

1936. La Mission considère en outre que l’ensemble des mesures qui privent les
Palestiniens de la bande de Gaza de moyens de subsistance, d’emploi, de logement et d’eau,
qui violent leur liberté de circulation et leur droit de sortir de leur pays et d’y revenir et
qui portent atteinte à leur droit à être entendus par un tribunal et à disposer d’un recours
utile pourrait habiliter un tribunal compétent à l’assimiler au crime de persécution, qui est
un crime contre l’humanité.

2. Actions d’Israël en Cisjordanie dans le cadre des opérations militaires menées
à Gaza du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009

a) Traitement infligé aux Palestiniens en Cisjordanie par les forces de sécurité
israéliennes, y compris l’emploi de la force excessive ou meurtrière pendant les
manifestations

1937. S’agissant des actes de violence commis par des colons contre les Palestiniens, la
Mission conclut qu’Israël a manqué aux obligations internationales qui lui incombent,
en vertu du droit international des droits de l’homme et du droit international
humanitaire, de protéger les Palestiniens contre la violence perpétrée par des particuliers.
Dans certains cas, les forces de sécurité ont laissé faire en violation de l’interdiction
d’infliger des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Lorsque cet acquiescement
n’est manifeste que dans le cas de la violence perpétrée par les colons à l’égard des
Palestiniens et non vice versa, il équivaut à de la discrimination fondée sur l’origine

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page 17

nationale, laquelle est interdite en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques.

1938. Israël a aussi porté atteinte à divers droits de l’homme en réprimant illégalement
des manifestations publiques pacifiques et en usant de force excessive contre les
manifestants. L’emploi d’armes à feu, y compris des balles réelles, et le recours aux tireurs
d’élite, entraînant la mort de manifestants, constituent une violation de l’article 6 du Pacte
car il s’agit d’une privation arbitraire de la vie et, dans les circonstances examinées par la
Mission, semblent indiquer une intention ou au moins une imprudence ayant causé un
préjudice à des civils, ce qui pourrait tenir lieu d’homicide intentionnel.

1939. L’emploi de la force excessive entraînant des blessures plutôt que la mort constitue
une violation de diverses normes, notamment des articles 7 et 9 du Pacte. Ces infractions
sont aggravées par les « instructions d’ouvrir le feu » apparemment discriminatoires données
aux forces de sécurité chargées de contrôler les manifestations, en fonction de la présence de
personnes de nationalité particulière, au mépris du principe de non-discrimination inscrit
dans le Pacte ainsi que dans l’article 27 de la quatrième Convention de Genève.

1940. La Mission conclut qu’Israël n’a pas mené d’enquêtes sur les actes commis par ses
agents ou des tiers ayant entraîné des violations graves du droit international humanitaire
et du droit des droits de l’homme, ni poursuivi les auteurs le cas échéant.

1941. La Mission s’est inquiétée des informations faisant état d’une recrudescence des
actes de violence commis par les colons au cours de l’année écoulée et du fait que les forces
de sécurité israéliennes n’empêchaient pas les attaques des colons contre les civils
palestiniens et leurs biens. Ces attaques se sont accompagnées d’infractions commises par
les forces israéliennes ou avec leur assentiment, notamment l’annulation du statut de
résident de Palestiniens, qui pourrait à terme déboucher sur une expulsion virtuelle et donc
d’autres violations de leurs droits.

b) Détention de Palestiniens par Israël

1942. La Mission a analysé les informations qui lui ont été communiquées sur la
détention de Palestiniens dans les prisons israéliennes lors ou dans le cadre des opérations
militaires de décembre 2008-janvier 2009 et a constaté que les pratiques en cours étaient
généralement contraires au droit des droits de l’homme et au droit international
humanitaire. Le système de justice militaire auquel les Palestiniens vivant dans le territoire
palestinien occupé sont soumis les prive de la garantie d’une procédure régulière qu’exige
le droit international.

1943. La Mission conclut que la détention de membres du Conseil législatif palestinien
par Israël viole le droit de ne pas être détenu arbitrairement, qui est protégé par l’article 9
du Pacte. Dans la mesure où cette détention tient à leur appartenance politique et empêche
ces membres de participer à la conduite des affaires publiques, elle constitue aussi une
violation de l’article 25, qui reconnaît le droit de prendre part à la direction des affaires
publiques, et de l’article 26, qui institue la protection égale de la loi. Dans la mesure où
leur détention n’est pas liée à leur comportement individuel, elle constitue une peine
collective, laquelle est interdite par l’article 33 de la quatrième Convention de Genève.

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page 18

Les informations portant sur la détention d’enfants et le traitement que leur infligent les
forces de sécurité israéliennes font apparaître des violations de leurs droits au titre du
Pacte et de la Convention des droits de l’enfant.

c) Violations du droit à la libre circulation

1944. La Mission conclut que les nombreuses restrictions qu’Israël impose à la
circulation des Palestiniens en Cisjordanie sont disproportionnées par rapport à tout
objectif légitime et contraires à l’article 27 de la quatrième Convention de Genève et à
l’article 12 du Pacte, qui garantissent la liberté de mouvement.

1945. Lorsque les postes de contrôle deviennent un lieu où la population protégée subit
des humiliations de la part des militaires ou du personnel civil, il peut s’agir d’une violation
de la règle de droit coutumier consignée dans l’alinéa b) de l’article 75 2) du Protocole
additionnel I.

1946. La poursuite de la construction de colonies dans le territoire occupé constitue une
violation de l’article 46 de la quatrième Convention de Genève. Les nombreuses
destructions et expropriations de biens, dont la confiscation de terres et la démolition
d’habitations en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, non justifiées par des impératifs
militaires et entreprises illégalement et sans discernement, constituent une grave violation
de l’article 147 de la quatrième Convention de Genève.

1947. Dans la mesure où les restrictions aux mouvements et à l’accès, les implantations et
leurs infrastructures, les politiques démographiques à l’égard de Jérusalem et de la « zone
C » de la Cisjordanie ainsi que la séparation de Gaza du reste de la Cisjordanie empêchent
l’instauration d’un État palestinien viable, contigu et souverain, elles constituent une
violation du droit jus cogens à l’autodétermination.

3. Actions d’Israël en Israël

1948. En ce qui concerne les violations présumées commises en Israël, la Mission conclut
que s’il semble ne pas y avoir de politique instituée à cet égard, les autorités auraient
parfois mis des obstacles aux activités des manifestants qui cherchent à exercer leur droit
de réunion pacifique et leur liberté d’expression pour critiquer les actions militaires
menées par Israël dans la bande de Gaza. Ces droits sont protégés par le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques. Les actes de violence physique commis
contre les manifestants et les autres humiliations, de nature moins grave, que fait subir la
police aux manifestants sont contraires aux obligations qui incombent à Israël au titre de
l’article 10 du Pacte. La Mission est aussi préoccupée par le fait que les militants soient
contraints de subir des interrogatoires auprès du Service général de sécurité (Shabak), ce
qui créerait en Israël un climat où la contestation n’est pas tolérée. Les mesures de
représailles prises par le Gouvernement israélien contre les organisations de la société
civile qui critiquent les autorités israéliennes et dénoncent les atteintes présumées au droit
international des droits de l’homme et au droit international humanitaire pendant les
opérations militaires vont à l’encontre de la Déclaration sur le droit et la responsabilité des
individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les droits de
l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus.

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1949. La Mission estime que le fait d’exclure presque totalement les médias et les
défenseurs des droits de l’homme de Gaza depuis le 5 novembre 2008 et pendant les
opérations porte atteinte aux obligations d’Israël eu égard au droit d’accès à l’information.

4. Actions des groupes armés palestiniens

1950. S’agissant des roquettes et obus de mortier tirés sur le sud d’Israël par les groupes
armés palestiniens opérant dans la bande de Gaza, la Mission conclut que les groupes
armés palestiniens ne font pas la distinction entre les cibles militaires et les populations et
objets civils du sud d’Israël. Le fait de tirer des roquettes et des obus qui ne peuvent viser
avec une précision suffisante les cibles militaires porte atteinte au principe fondamental de
distinction. Lorsqu’il n’y a pas de cibles militaires visées et que les roquettes et obus sont
lancés sur des zones civiles, il s’agit d’attaques délibérées contre la population civile, actes
qui constituent des crimes de guerre, voire des crimes contre l’humanité.

1951. La Mission conclut que les roquettes et les obus de mortier lancés par les groupes
armés palestiniens opérant dans la bande de Gaza ont engendré la terreur dans les
communautés touchées dans le sud d’Israël. Ces attaques ont causé la perte de vies, des
atteintes à l’intégrité physique et mentale des civils ainsi que des dommages aux
habitations, aux édifices religieux et aux biens ; elles ont mis à mal la vie économique et
culturelle des communautés touchées et gravement compromis les droits économiques et
sociaux de la population.

1952. En ce qui concerne la détention continue du soldat israélien Gilad Shalit, la
Mission conclut qu’en sa qualité de membre des forces armées israéliennes capturé lors
d’une incursion ennemie en Israël, Gilad Shalit remplit les conditions requises, au regard
de la troisième Convention de Genève, pour être considéré comme un prisonnier de guerre.
En tant que tel, il devrait être protégé, traité avec humanité et autorisé à communiquer
avec l’extérieur de la façon prescrite par la Convention.

1953. La Mission s’est également penchée sur la question de savoir si les groupes armés
palestiniens ont respecté les obligations que leur impose le droit international humanitaire
de veiller constamment à réduire les risques pour la population civile de Gaza au sein de
laquelle se sont déroulées les hostilités. Le fait de mener des hostilités dans des zones bâties
ne constitue pas en soi une violation du droit international. Toutefois, le fait de lancer des
attaques − qu’il s’agisse de roquettes ou d’obus de mortier sur la population du sud
d’Israël ou sur les forces armées israéliennes dans Gaza − à proximité de bâtiments civils
ou protégés revient à ne pas prendre toutes les précautions possibles. Dans ce cas, les
groupes armés palestiniens auraient inutilement exposé la population civile de Gaza aux
dangers inhérents aux opérations militaires qui se déroulent autour d’elle. La Mission n’a
pas eu de preuve indiquant que les groupes armés palestiniens ont orienté des civils vers
des zones où des attaques étaient lancées ni qu’ils ont forcé des civils à demeurer à
proximité des attaques. Par ailleurs, la Mission n’a pas eu de preuve indiquant que des
groupes armés palestiniens engagés dans les combats portaient des vêtements civils. Si rien
n’indiquait, à l’issue de l’enquête qu’elle a menée sur une attaque israélienne contre une
mosquée, que cette mosquée était utilisée à des fins militaires ou pour dissimuler des
activités militaires, la Mission ne peut exclure cette possibilité dans d’autres cas.

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page 20

5. Actions des autorités palestiniennes compétentes

1954. Bien que les autorités de Gaza nient exercer un quelconque contrôle sur les
groupes armés et refusent toute responsabilité pour leurs actes, de l’avis de la Mission, si
elles ne prennent pas les mesures nécessaires pour empêcher les groupes armés palestiniens
de mettre en péril la population civile, elles pourraient être tenues responsables des
préjudices causés aux civils vivant à Gaza.

1955. La Mission conclut que les services de sécurité relevant des autorités de Gaza ont
procédé à des exécutions extrajudiciaires et à des arrestations et détentions arbitraires et
infligé des mauvais traitements aux populations, en particulier aux opposants politiques, ce
qui constitue des violations graves des droits fondamentaux à la vie, à la liberté et à la
sécurité, du droit d’être à l’abri de la torture ou des traitements et peines cruels, inhumains
ou dégradants, du droit d’être protégé contre les arrestations et détentions arbitraires, du
droit à un procès équitable et impartial et de la liberté d’opinion et d’expression, y compris
le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions.

1956. La Mission conclut aussi que les mesures prises par l’Autorité palestinienne à
l’encontre des opposants politiques en Cisjordanie, qui ont commencé en janvier 2006 et se
sont intensifiées entre le 27 décembre 2008 et le 18 janvier 2009, constituent une violation
des droits de l’homme et de la loi fondamentale palestinienne. Toute détention pour des
raisons politiques porte atteinte à la liberté et à la sécurité de la personne, au droit à un
procès équitable et au droit de ne pas faire l’objet de discrimination pour ses opinions
politiques, qui sont reconnus par le droit international coutumier. Les informations faisant
état de torture et d’autres formes de mauvais traitements pendant les arrestations et
détentions et de mort en détention doivent faire rapidement l’objet d’enquêtes afin
d’établir les responsabilités.

K. Faire jouer le principe de responsabilité

1957. La Mission a été frappée par le fait que les victimes, défenseurs des droits de
l’homme, interlocuteurs de la société civile et responsables palestiniens ont sans cesse
indiqué qu’ils espéraient que cette mission d’enquête serait la dernière du genre, parce
qu’elle déboucherait sur une action en faveur de la justice. Elle a été également frappée par
les propos selon lesquels chaque fois qu’un rapport est publié et qu’il reste sans suite,
« Israël s’en trouve renforcé dans sa conviction d’être intouchable ». Ne pas faire jouer le
principe de responsabilité renforce l’impunité et porte atteinte à la crédibilité de
l’Organisation des Nations Unies et de la communauté internationale. La Mission estime
que les États Membres et les organismes des Nations Unies doivent tenir dûment compte de
ces observations lorsqu’ils examineront ses conclusions et recommandations et prendre les
mesures qui s’imposent.

1958. La Mission est fermement convaincue que la justice et le respect de l’état de droit
constituent le fondement indispensable de la paix. La situation d’impunité qui perdure a
créé dans le territoire palestinien occupé une crise de la justice qui exige l’adoption des
mesures voulues.

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 21

1959. Après avoir examiné le système israélien d’enquête et de poursuite concernant les
violations graves des droits de l’homme et du droit humanitaire, en particulier en ce qui
concerne les cas présumés de crime de guerre et de crime contre l’humanité, la Mission a
constaté d’importantes lacunes structurelles qui, à son avis, sont contraires aux normes
internationales. Les séances de « débriefing opérationnel » militaire étant au centre du
système, il n’existe pas de mécanisme efficace et impartial d’enquête et les victimes de
violations présumées sont privées de tout recours efficace ou rapide. En outre, les enquêtes
ayant un caractère interne pour l’autorité militaire israélienne, elles ne respectent pas les
normes internationales d’indépendance et d’impartialité. La Mission pense que les
quelques enquêtes menées par les autorités israéliennes sur les allégations de violations
flagrantes du droit international humanitaire et du droit des droits de l’homme, et en
particulier sur les cas présumés de crimes de guerre dans le contexte des opérations
militaires menées à Gaza entre le 27 décembre 2008 et 18 janvier 2009, se ressentent des
défauts du système, ont été inutilement retardées malgré la gravité des allégations et, par
conséquent, manquent de crédibilité et ne sont pas conformes aux normes internationales.
La Mission est préoccupée par le fait que les enquêtes sur les violations relativement moins
graves que le Gouvernement israélien dit avoir engagées traînent sans raison.

1960. La Mission a constaté le caractère systématique des retards, de l’inaction ou de la
façon peu satisfaisante dont les autorités israéliennes traitent les enquêtes, les poursuites et
les condamnations de militaires et de colons auteurs d’actes de violence et d’infractions
contre les Palestiniens, y compris en Cisjordanie, ainsi que l’issue discriminatoire des
procédures. En outre, le cadre constitutionnel et juridique actuel en Israël offre très peu de
possibilités, s’il en est, aux Palestiniens pour demander indemnisation et réparation.

1961. Forte des informations qu’elle a examinées et de son analyse, la Mission conclut
qu’on peut sérieusement douter de la volonté d’Israël de mener véritablement des enquêtes
impartiales, indépendantes, rapides et efficaces comme l’exige le droit international.
La Mission est aussi d’avis que le système présente des caractéristiques intrinsèquement
discriminatoires qui rendent extrêmement difficile toute quête de justice pour les victimes
palestiniennes.

1962. En ce qui concerne les allégations de violations du droit international humanitaire
relevant de la juridiction des autorités palestiniennes compétentes à Gaza, la Mission
conclut qu’elles n’ont pas fait l’objet d’enquêtes.

1963. La Mission fait valoir que la responsabilité d’enquêter sur les violations du droit
international humanitaire et des droits de l’homme, d’engager des poursuites le cas échéant
et de juger les auteurs incombe au premier chef aux autorités et institutions nationales.
C’est une obligation juridique qui incombe aux États et aux entités quasi étatiques.
Toutefois, lorsque les autorités nationales ne sont pas en mesure de le faire ou sont peu
disposées à s’acquitter de cette obligation, les mécanismes de justice internationale peuvent
être activés afin d’empêcher l’impunité.

1964. La Mission estime que, dans ces circonstances, il est peu probable que les auteurs
de violations graves du droit international humanitaire et des droits de l’homme aient à
répondre de leurs actes devant des institutions nationales en Israël et encore moins à Gaza.
La Mission fait valoir que l’impunité de longue date a été un facteur essentiel qui a

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 22

contribué à perpétuer la violence dans la région et les violations à répétition ainsi qu’à
favoriser le manque de confiance chez les Palestiniens et de nombreux Israéliens quant aux
perspectives de justice et à une solution pacifique au conflit.

1965. La Mission estime que bon nombre des violations recensées dans son rapport
constituent des atteintes graves à la quatrième Convention de Genève. Elle fait valoir que
les Conventions de Genève imposent à toutes les hautes parties contractantes l’obligation
de rechercher et de traduire devant les tribunaux les personnes responsables des violations
présumées.

1966. La Mission estime que les violations graves du droit international humanitaire
dont il est question dans le présent rapport relèvent de la compétence de la Cour pénale
internationale. Elle note que le Conseil de sécurité des Nations Unies a de longue date
reconnu que la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, avait des
répercussions sur la paix et la sécurité internationales, et que celui-ci examine
régulièrement la situation. La Mission est persuadée que, vu le caractère persistant du
conflit, les allégations fréquentes et constantes de violation du droit international
humanitaire portées contre toutes les parties, l’intensification apparente de ces violations
pendant les récentes opérations militaires et l’éventualité regrettable d’une recrudescence
de la violence, l’adoption de mesures significatives et pratiques pour mettre fin à l’impunité
serait un moyen efficace d’empêcher que ces violations se reproduisent à l’avenir.

La Mission est d’avis qu’exercer des poursuites contre les personnes responsables de
violations graves du droit international humanitaire contribuerait à mettre fin à ces
violations, à protéger les civils et à rétablir et maintenir la paix.

XXXI. RECOMMANDATIONS

1967. La Mission formule les recommandations suivantes en ce qui concerne :

- a) La responsabilité à l’égard des violations graves du droit international humanitaire ;
- b) Les réparations ;
- c) Les violations graves du droit des droits de l’homme ;
- d) Le blocus et la reconstruction ;
- e) L’emploi des armes et les procédures militaires ;
- f) La protection des organisations et des défenseurs des droits de l’homme ;
- g) La suite à donner aux recommandations de la Mission.

1968. À l’intention du Conseil des droits de l’homme,

a) La Mission recommande que le Conseil des droits de l’homme de l’ONU
approuve les recommandations figurant dans le présent rapport, prenne les mesures
voulues pour les appliquer de la manière recommandée par la Mission ou par d’autres

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 23

moyens jugés appropriés, et continue d’examiner leur mise en oeuvre lors des sessions
futures ;

b) Étant donné la gravité des violations du droit international des droits de
l’homme et du droit international humanitaire et les éventuels crimes de guerre et crimes
contre l’humanité dont elle a fait état, la Mission recommande que le Conseil des droits de
l’homme demande au Secrétaire général de l’ONU de porter le présent rapport à
l’attention du Conseil de sécurité de l’ONU en vertu de l’Article 99 de la Charte des
Nations Unies, de façon que le Conseil de sécurité puisse envisager des mesures
conformément aux recommandations pertinentes de la Mission qui sont indiquées ci-après ;

c) La Mission recommande en outre que le Conseil des droits de l’homme
présente officiellement le présent rapport au Procureur de la Cour pénale internationale ;

d) La Mission recommande que le Conseil des droits de l’homme présente le
présent rapport à l’Assemblée générale en demandant à celle-ci de l’examiner ;

e) La Mission recommande que le Conseil des droits de l’homme porte les
recommandations de la Mission à l’attention des organes conventionnels des Nations Unies
s’occupant des droits de l’homme de manière que leur examen périodique du respect par
Israël de ses obligations en matière de droits de l’homme tienne compte, en fonction de leur
mandat et de leurs procédures, des progrès accomplis dans l’application desdites
recommandations. La Mission recommande en outre que le Conseil des droits de l’homme
prenne en considération ces progrès dans le cadre de son processus d’examen périodique
universel.

1969. À l’intention du Conseil de sécurité de l’ONU,

a) La Mission recommande que le Conseil de sécurité demande au
Gouvernement israélien, en vertu de l’Article 40 de la Charte des Nations Unies :

i) De prendre toutes les mesures voulues, dans un délai de trois mois, afin
de lancer des enquêtes appropriées, qui soient indépendantes et
conformes aux normes internationales, sur les violations graves du droit
international humanitaire et du droit international des droits de
l’homme signalées par la Mission et sur toute autre allégation grave qui
pourrait être portée à son attention ;

ii) D’informer le Conseil de sécurité, dans un nouveau délai de trois mois,
des mesures prises ou sur le point d’être prises par le Gouvernement
israélien pour s’enquérir de ces violations graves, mener des enquêtes et
engager des poursuites à leur sujet ;

b) La Mission recommande en outre que le Conseil de sécurité crée en même
temps un comité indépendant d’experts du droit international humanitaire et du droit
international des droits de l’homme et signale toute action judiciaire ou autre intentée
devant les juridictions nationales par le Gouvernement israélien au sujet des enquêtes
susmentionnées. Ce comité d’experts devrait faire rapport au Conseil de sécurité, à la fin

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 24

du délai de six mois, sur son évaluation des poursuites engagées en la matière par le
Gouvernement israélien devant les juridictions internes, y compris leur état d’avancement,
leur efficacité et leur authenticité, de façon que le Conseil de sécurité puisse évaluer si des
mesures appropriées ont été prises ou sont sur le point de l’être au niveau national, afin
que justice soit rendue aux victimes et que la responsabilité des auteurs soit établie.
Le Conseil de sécurité devrait demander au comité d’experts de lui faire rapport à des
intervalles déterminés, selon que de besoin. Le comité devrait recevoir un appui approprié
du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme ;

c) La Mission recommande que le Conseil de sécurité, dès qu’il sera saisi du
rapport du comité d’experts, examine la situation et, en l’absence d’enquêtes
indépendantes entreprises ou sur le point d’être entreprises de bonne foi et conformément
aux normes internationales par les autorités compétentes de l’État d’Israël dans un délai de
six mois à compter de la date de sa résolution, en vertu de l’Article 40 de la Charte des
Nations Unies, agissant de nouveau en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations
Unies, défère la situation à Gaza au Procureur de la Cour pénale internationale en
application de l’article 13 b) du Statut de Rome ;

d) La Mission recommande que le Conseil de sécurité demande au comité
indépendant d’experts visé à l’alinéa b) ci-dessus de suivre toute action judiciaire ou autre
intentée devant les juridictions nationales par les autorités compétentes dans la bande de
Gaza au sujet des enquêtes susmentionnées, et de faire rapport à ce sujet. À l’expiration du
délai de six mois, le comité d’experts devrait faire rapport au Conseil de sécurité sur son
évaluation des poursuites engagées devant les juridictions nationales par les autorités
compétentes à Gaza, y compris leur état d’avancement, leur efficacité et leur authenticité,
de façon que le Conseil de sécurité puisse évaluer quelles mesures ont été prises ou sont sur
le point de l’être au niveau national afin que justice soit rendue aux victimes et que la
responsabilité des auteurs soit établie. Le Conseil de sécurité devrait demander au comité
d’experts de lui faire rapport à des intervalles déterminés, selon que de besoin ;

e) La Mission recommande que le Conseil de sécurité, dès qu’il sera saisi du
rapport du comité d’experts, examine la situation et, en l’absence d’enquêtes entreprises ou
sur le point d’être entreprises de bonne foi, de manière indépendante et conformément aux
normes internationales par les autorités compétentes à Gaza dans un délai de six mois à
compter de la date de sa résolution, en vertu de l’Article 40 de la Charte des Nations Unies,
agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, défère la situation à
Gaza au Procureur de la Cour pénale internationale en application de l’article 13 b) du
Statut de Rome ;

f) La Mission recommande que le manque de coopération du Gouvernement
israélien ou des autorités de Gaza aux travaux du comité soit considéré par le Conseil de
sécurité comme faisant obstruction à ces travaux.

1970. À l’intention du Procureur de la Cour pénale internationale, au sujet de la
déclaration faite en vertu de l’article 12 3) par le Gouvernement de la Palestine et reçue
par le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale, la Mission considère que la
responsabilité à l’égard des victimes et les intérêts de la paix et de la justice dans la région
requièrent que le Procureur se prononce en droit aussi rapidement que possible.

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 25

1971. À l’intention de l’Assemblée générale,

a) La Mission recommande que l’Assemblée générale demande au Conseil de
sécurité de lui faire rapport sur les mesures prises afin d’établir la responsabilité à l’égard
des violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits
de l’homme au sujet des faits mentionnés dans le présent rapport ou de tout autre fait
pertinent dans le contexte des opérations militaires à Gaza, y compris l’application des
recommandations de la Mission. L’Assemblée générale restera saisie de la question jusqu’à
ce qu’elle constate que des mesures appropriées sont prises au niveau national ou
international afin que justice soit rendue aux victimes et que la responsabilité des auteurs
soit établie. L’Assemblée générale pourra examiner si des mesures supplémentaires
relevant de ses pouvoirs sont nécessaires dans l’intérêt de la justice, y compris au titre de sa
résolution 377 (V) sur l’union pour le maintien de la paix ;

b) La Mission recommande que l’Assemblée générale crée un compte séquestre
qui sera utilisé pour verser des compensations suffisantes aux Palestiniens ayant subi des
pertes et des dommages à la suite des actes illégaux attribuables à Israël durant l’opération
militaire de décembre à janvier et des agissements en rapport avec ces actes, et que le
Gouvernement israélien verse à ce compte les montants requis. La Mission recommande en
outre que l’Assemblée générale demande au Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l’homme de fournir des conseils d’expert sur les modalités voulues pour créer le
compte séquestre ;

c) La Mission recommande que l’Assemblée générale demande au
Gouvernement suisse de réunir une conférence des Hautes Parties Contractantes à la
Quatrième Convention de Genève de 1949 qui sera chargée d’examiner les mesures à
prendre pour appliquer la Convention dans le territoire palestinien occupé et en assurer le
respect conformément à son article premier ;

d) La Mission recommande que l’Assemblée générale promeuve un débat
urgent sur la légalité future de l’utilisation de certaines munitions mentionnées dans le
présent rapport, en particulier le phosphore blanc, les fléchettes et les métaux lourds tels
que le tungstène. Dans ce débat, l’Assemblée générale devrait notamment tirer parti des
compétences du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). La Mission recommande
en outre que le Gouvernement israélien déclare un moratoire sur l’utilisation de telles
armes en raison des souffrances humaines et des dégâts qu’elles ont causés dans la bande
de Gaza.

1972. À l’intention de l’État d’Israël,

a) La Mission recommande qu’Israël mette immédiatement fin à la fermeture
des frontières et aux restrictions imposées au passage par les points de franchissement de la
frontière avec la bande de Gaza et permette le passage des biens nécessaires et en quantité
suffisante pour répondre aux besoins de la population, pour reconstruire les habitations et
remettre en état les services essentiels et pour assurer la reprise d’une activité économique
normale dans la bande de Gaza ;

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 26

b) La Mission recommande qu’Israël mette fin aux restrictions d’accès à la mer
à des fins halieutiques imposées à la bande de Gaza et permette des activités de pêche dans
la limite de 20 milles marins prévues dans les Accords d’Oslo. Elle recommande en outre
qu’Israël autorise la reprise des activités agricoles dans la bande de Gaza, y compris dans
les zones qui se trouvent à proximité des frontières avec Israël ;

c) Israël devrait entreprendre un réexamen des règles d’engagement, des
instructions permanentes, des règles d’ouverture de feu et des autres directives à
l’intention du personnel militaire et de sécurité. La Mission recommande qu’Israël fasse
appel aux compétences du Comité international de la Croix-Rouge, du Haut-Commissariat
des Nations Unies aux droits de l’homme et des autres organes concernés, ainsi qu’aux
experts israéliens et aux organisations de la société civile disposant des compétences et
spécialistes voulus, afin d’assurer à cet égard le respect du droit international humanitaire
et du droit international des droits de l’homme. En particulier, les règles d’engagement
devraient permettre d’intégrer effectivement les principes de proportionnalité, de
distinction, de précaution et de non-discrimination dans toutes les directives de ce genre et
dans toute consigne orale destinée aux officiers, aux soldats et aux forces de sécurité, de
manière à épargner à la population civile palestinienne les meurtres, les destructions et les
atteintes à la dignité humaine en violation du droit international ;

d) La Mission recommande qu’Israël autorise la liberté de circulation des
Palestiniens à l’intérieur du territoire palestinien occupé − en Cisjordanie, y compris
Jérusalem-Est, entre la bande de Gaza et la Cisjordanie et entre le territoire palestinien
occupé et le monde extérieur − conformément aux normes du droit international des droits
de l’homme et aux engagements internationaux contractés par Israël et les représentants
du peuple palestinien. La Mission recommande en outre qu’Israël lève immédiatement les
interdictions de voyager dont les Palestiniens font actuellement l’objet en raison de leurs
activités politiques ou concernant les droits de l’homme ;

e) La Mission recommande qu’Israël libère les Palestiniens qui sont détenus
dans les prisons israéliennes dans le cadre de l’occupation. La libération des enfants doit
constituer une priorité absolue. La Mission recommande en outre qu’Israël mette fin aux
traitements discriminatoires des détenus palestiniens. Les visites des familles des
prisonniers de Gaza doivent reprendre ;

f) La Mission recommande qu’Israël cesse immédiatement de s’ingérer dans les
processus politiques nationaux dans le territoire palestinien occupé et, à titre de première
mesure, libère tous les membres du Conseil législatif palestinien actuellement détenus et
autorise tous les membres du Conseil à circuler entre Gaza et la Cisjordanie de manière
que le Conseil puisse fonctionner de nouveau ;

g) La Mission recommande que le Gouvernement israélien mette fin aux
mesures visant à limiter l’expression de critiques par la société civile et les membres du
public à l’égard des politiques et de la conduite d’Israël durant les opérations militaires
dans la bande de Gaza. La Mission recommande aussi qu’Israël lance une enquête
indépendante afin d’évaluer si le traitement par les autorités judiciaires israéliennes des
Israéliens palestiniens et juifs exprimant un désaccord au sujet de l’offensive a été
discriminatoire, en ce qui concerne aussi bien les chefs d’accusation que la détention

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 27

provisoire. Les résultats de l’enquête devraient être rendus publics et, suivant ce qui y a été
constaté, des mesures correctives appropriées devraient être prises ;

h) La Mission recommande que le Gouvernement israélien s’abstienne de toutes
représailles contre les personnes et les organisations palestiniennes et israéliennes qui ont
coopéré avec la Mission d’établissement des faits de l’Organisation des Nations Unies sur le
conflit de Gaza, en particulier les personnes qui ont participé aux auditions publiques
tenues par la Mission à Gaza et à Genève et ont exprimé des critiques à l’égard des actions
commises par Israël ;

i) La Mission recommande qu’Israël s’engage de nouveau à respecter
l’inviolabilité des locaux et du personnel des Nations Unies et prenne toutes les mesures
voulues pour veiller à ce que les violations ne se répètent pas à l’avenir. Elle recommande
en outre qu’Israël dédommage l’Organisation des Nations Unies intégralement et sans plus
de retard, et que l’Assemblée générale examine cette question.

1973. À l’intention des groupes armés palestiniens,

a) La Mission recommande que les groupes armés palestiniens s’engagent
immédiatement à respecter le droit international humanitaire, notamment en renonçant à
attaquer les civils et les biens de caractère civil israéliens, et prennent toutes les mesures de
précaution possibles pour éviter de nuire aux civils palestiniens durant les hostilités ;
b) La Mission recommande que les groupes armés palestiniens qui détiennent le
soldat israélien Gilad Shalit le relâchent pour des raisons humanitaires. En attendant cette
libération, ils devraient reconnaître son statut de prisonnier de guerre, le traitent en tant
que tel et l’autorisent à recevoir des visites du CICR.

1974. À l’intention des autorités palestiniennes responsables,

a) La Mission recommande que l’Autorité palestinienne publie des instructions
claires aux forces de sécurité sous son commandement afin que celles-ci respectent les
normes en matière de droits de l’homme inscrites dans la loi fondamentale palestinienne et
les instruments internationaux, qu’elle mène promptement une enquête indépendante sur
toutes les allégations de violations graves des droits de l’homme commises par les forces de
sécurité sous son contrôle, et cesse de recourir à la justice militaire pour examiner les
affaires impliquant des civils ;

b) La Mission recommande que l’Autorité palestinienne et les autorités de Gaza
libèrent sans retard tous les détenus politiques actuellement en leur pouvoir et
s’abstiennent de procéder à de nouvelles arrestations pour des raisons politiques et en
violation du droit international des droits de l’homme ;

c) La Mission recommande que l’Autorité palestinienne et les autorités de Gaza
continuent de permettre aux organisations non gouvernementales palestiniennes, y compris
les organisations des droits de l’homme, et à la Commission indépendante des droits de
l’homme de fonctionner de manière libre et indépendante.

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 28

1975. À l’intention de la communauté internationale,

a) La Mission recommande que les États parties aux Conventions de Genève de
1949 ouvrent des enquêtes judiciaires devant les tribunaux nationaux, en exerçant la
compétence universelle, lorsqu’il existe suffisamment d’éléments prouvant que de graves
violations des Conventions de Genève de 1949 ont été commises. Lorsque les résultats des
enquêtes le justifient, les auteurs présumés devraient être arrêtés et poursuivis
conformément aux normes de justice internationalement reconnues ;

b) Les bailleurs d’aide internationaux devraient accélérer leur assistance
financière et technique destinée aux organisations assurant un soutien psychologique et des
services de santé mentale à la population palestinienne ;

c) Étant donné la fonction essentielle qu’ils remplissent, la Mission recommande
que les pays donateurs et les bailleurs d’aide continuent d’appuyer les travaux des
organisations des droits de l’homme palestiniennes et israéliennes en communiquant des
documents et des rapports publics sur les violations des droits de l’homme et du droit
international humanitaire et en conseillant les autorités compétentes quant à leur respect
du droit international ;

d) La Mission recommande que les États impliqués dans les négociations de paix
entre Israël et les représentants du peuple palestinien, en particulier le Quatuor, veillent à
ce que le respect de l’état de droit, du droit international et des droits de l’homme jouent
un rôle central dans les initiatives de paix parrainées sur le plan international ;

e) Étant donné les allégations et les rapports concernant les dégâts
environnementaux à long terme que risquent d’avoir causés certaines munitions ou débris
de munitions, la Mission recommande qu’un programme de surveillance de
l’environnement soit entrepris sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies
pendant aussi longtemps qu’il sera jugé nécessaire. Le programme devrait englober la bande
de Gaza et les zones du sud d’Israël proches des lieux d’impact. Il devrait être conforme aux
recommandations d’un organe indépendant, et une ou plusieurs institutions d’experts
indépendantes devraient prélever des échantillons et les analyser. Ces recommandations,
tout du moins au départ, devraient comprendre des mécanismes de mesure répondant aux
craintes actuelles de la population de Gaza et du sud d’Israël et devraient au minimum
permettre de déterminer la présence de tout métal lourd, de phosphore blanc, de
microshrapnel et de granulés de tungstène et d’autres produits chimiques que pourrait
révéler l’enquête.

1976. À l’intention de la communauté internationale et des autorités palestiniennes
responsables,

a) La Mission recommande de créer des mécanismes appropriés pour veiller à
ce que les fonds promis par les donateurs internationaux aux fins de reconstruction dans la
bande de Gaza soient décaissés efficacement et sans contretemps et utilisés d’urgence au
bénéfice de la population de Gaza ;

A/HRC/12/48 (ADVANCE 2)
page 29

b) Étant donné les conséquences des opérations militaires, la Mission
recommande que les autorités palestiniennes responsables ainsi que les bailleurs d’aide
internationale accordent une attention particulière aux besoins des personnes handicapées.
De plus, elle recommande que les structures compétentes palestiniennes et internationales
assurent un suivi médical des patients qui ont été amputés ou blessés par des munitions
dont la nature n’a pas été éclaircie, afin de contrôler tout effet éventuel à long terme sur
leur santé. Une assistance financière et technique devrait être fournie afin d’assurer un
suivi médical adéquat des patients palestiniens.

1977. À l’intention de la communauté internationale, d’Israël et des autorités
palestiniennes,

a) La Mission recommande qu’Israël et les représentants du peuple palestinien
ainsi que les acteurs internationaux impliqués dans le processus de paix fassent participer
la société civile israélienne et palestinienne à l’élaboration d’accords de paix durable fondés
sur le respect du droit international. La participation des femmes devrait être assurée
conformément à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité ;

b) La Mission recommande de prêter attention à la situation des femmes et de
prendre des mesures pour veiller à ce qu’elles bénéficient d’une compensation, d’une
assistance juridique et de la sécurité économique.

1978. À l’intention du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, la Mission
recommande que le Secrétaire général élabore une politique afin d’intégrer les droits de
l’homme dans les initiatives de paix auxquelles participe l’Organisation des Nations Unies,
en particulier le Quatuor, et qu’il demande au Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l’homme de fournir les compétences nécessaires pour appliquer cette
recommandation.

1979. À l’intention du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme,

a) La Mission recommande que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l’homme suive la situation des personnes qui ont coopéré avec la Mission
d’établissement des faits de l’Organisation des Nations Unies sur le conflit de Gaza et mette
périodiquement au courant le Conseil des droits de l’homme grâce à ses rapports publics et
par d’autres moyens jugés appropriés ;

b) La Mission recommande que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l’homme tienne compte des recommandations de la Mission dans les rapports
périodiques qu’il présente au Conseil des droits de l’homme au sujet du territoire
palestinien occupé.



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